CITATION
Les dirigeants du PS cherchent à durcir le ton à l'égard des mouvements d'extrême gauche
LE MONDE | 21.08.03 | 12h59 • MIS A JOUR LE 21.08.03 | 13h14
A la veille de l'université d'été du Parti socialiste, qui se tiendra à partir du 29 août à La Rochelle, M. Hollande cherche à rompre avec toute forme de radicalisation sans perdre de terrain.
Les socialistes semblent vouloir montrer les dents. A quelques jours de leur université d'été, qui s'ouvrira le 29 août à La Rochelle (Charente-Maritime) - et à la veille de celle de l'association altermondialiste Attac, qui débute vendredi 22 août à Arles (Bouches-du-Rhône), les dirigeants du PS, gênés par les succès politiques et médiatiques de la "gauche de la gauche" cherchent à reprendre l'initiative.
Prenant acte du succès massif du rassemblement Larzac 2003 et de José Bové, François Hollande avait fixé la ligne, le 11 août, en estimant que la manifestation - qui a attiré 200 000 personnes - "contribuait au renouveau de la gauche, à condition de lui donner un débouché politique". Toutefois, n'oubliant pas que le stand du PS y avait été saccagé, le premier secrétaire déplorait la présence, dans la mouvance du leader paysan, "de dérives populistes, poujadistes, dangereuses".
L'équation politique des socialistes est ainsi posée : le réancrage dans le "mouvement social" est leur objectif affiché, mais ils veulent tenir le PS à distance de toute radicalisation venue de l'extrême gauche. La recherche d'une synthèse passe par une "clarification" en forme de coupure à l'égard de toute contestation, même implicite, des institutions démocratiques. Le leitmotiv des hiérarques du PS à l'égard des partis trotskistes (Lutte ouvrière et LCR), qui ont contribué, par leur poids électoral, à éliminer Lionel Jospin le 21 avril 2002, consiste à souligner leur refus d'adhérer à tout projet de gouvernement. Au point qu'à La Rochelle, un atelier aura pour thème : "L'extrême gauche avec ou contre la gauche ?"
"SORTIR DE L'IMPASSE"
Dans Le Parisien du 18 août, le député (PS) de Paris, Jean-Christophe Cambadélis, théoricien de l'ex "gauche plurielle", invitait son parti à "sortir de l'impasse" et à "définir son réformisme -et à- le faire respecter". "Il ne faut plus nous laisser faire, assure pour sa part Vincent Peillon, l'un des dirigeants du courant NPS. Il est grand temps de montrer les contradictions et les dérives de certains discours ; de montrer qu'à la gauche de la gauche, tout le monde n'est pas aussi fréquentable."
L'urgence de cette clarification apparaît d'autant plus nettement aux socialistes que la droite a décidé de mettre en valeur l'importance de l'extrême gauche et les hypothèques qu'elle fait peser sur l'avenir électoral du PS. Le porte-parole du gouvernement, Jean-François Copé, affirmait, le 12 août, qu'"il y a en France une force politique totalement organisée ou réorganisée, qui s'appelle l'extrême gauche, qui surfe sur des problèmes tout à fait légitimes (...) pour essayer d'être l'opposition numéro un dans notre pays". Auparavant, le porte-parole de l'UMP, Renaud Donnedieu de Vabres, était allé plus loin en confiant au Point : "On a le sentiment que l'opposition est incarnée par l'extrême gauche."
Les socialistes ont pris conscience que la majorité va s'employer à brandir l'épouvantail d'une extrême gauche antidémocratique comme le PS le fit longtemps à l'égard du Front national pour embarrasser la droite. "L'UMP rêve que José Bové crée un espace poujadiste pour que la gauche se retrouve piégée", a décrypté M. Cambadélis.
Les échanges d'amabilités se succèdent depuis un an entre une extrême gauche en phase ascendante et un PS mal remis de la défaite. Alors qu'Olivier Besancenot, candidat de la LCR à l'élection présidentielle de 2002, ironisait sur le fait que la gauche alternative n'avait "rien à faire avec la gauche de Laurent Fabius et de Dominique Strauss-Kahn", M. Hollande, confronté à Arlette Laguiller sur France 2, dans l'émission "100 minutes pour convaincre", lui avait lancé : "Avec des révolutionnaires comme vous, les conservateurs peuvent dormir tranquilles !"
La volonté d'isoler les extrémistes trouve un écho au sein même du mouvement altermondialiste. Le président d'Attac, l'économiste Jacques Nikonoff - qui est aussi membre du PCF - a publié, dans Libération du 18 août, une diatribe contre "le verbiage, la violence, les gesticulations, le sectarisme qui marquent la tradition de l'extrême gauche". Ces critiques, qui ont suscité des remous dans l'association, ont été perçues comme une critique de M. Bové, lui-même membre fondateur d'Attac et invité de son université d'été - mais dont la venue n'y est pas annoncée.
Hervé Gattegno et Nicolas Weill[/quote]