Prisons : un cloaque inimaginable de l'extérieur

Message par magdalene » 19 Juil 2003, 13:45

CITATION L'Observatoire international des prisons a encouragé les détenus à écrire.

La lettre s'intitule "Les conditions de vie... ou de mort dans les prisons". Elle est signée par un détenu de la maison d'arrêt Charles III de Nancy, l'un des établissements pénitentiaires les plus vétustes de France, qui, au 1er juin, accueillait 332 détenus pour 259 places.  "La prison, c'est une décharge nationale, c'est le lieu du tout répressif, une machine à démolir et à exclure, écrit le prisonnier, incarcéré depuis 40 mois à Nancy. C'est dur, on ne s'y fait pas. C'est une sensation de maison des morts, avec des odeurs, des cris. Dans ce cloaque inimaginable de l'extérieur, on est réduit à l'état de chose qu'on dirige, qu'on asservit."

Ce témoignage a été récemment adressé par le condamné à son avocate, Me Delphine Mercier. A la suite d'un appel lancé le 8 avril par l'Observatoire international des prisons (OIP), celle-ci a reçu d'autres courriers de détenus qui entendent dénoncer devant la justice leurs conditions de détention. Par l'intermédiaire de Me Mercier, six plaintes contre X... ont ainsi été déposées depuis la fin du mois de juin devant le procureur de la République. Les détenus y évoquent les conflits incessants en raison de la chaleur et de la promiscuité, l'hygiène déplorable des cellules, les odeurs nauséabondes, l'absence d'activités...

Selon l'OIP, cette situation vécue par des milliers de détenus en France constitue une infraction au titre de l'article 225-14 du code pénal, qui punit de cinq ans d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende le fait de "soumettre une personne, dont la vulnérabilité ou l'état de dépendance sont apparents ou connus de l'auteur, à des conditions de travail ou d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine".

A Nancy, les prisonniers les mieux lotis se retrouvent à six dans une cellule de 24 m2 prévue pour quatre, percée d'une petite fenêtre clôturée par sept barreaux et du grillage. Une fois déduites les surfaces occupées par la table, les chaises, les placards, les lits, le WC, la poubelle et le réfrigérateur loué 8,23 euros par mois, "il ne reste que 1,3 m2 à chacun pour évoluer, ce qui fait qu'il est difficile à tous d'être debout et de se déplacer sans gêner quelqu'un", écrit le détenu incarcéré depuis 40 mois. Dans ces conditions, "certains préfèrent rester sur leur lit", ajoute-t-il.

À CINQ DANS 12 M2

D'autres sont moins bien lotis. Selon les plaintes transmises au parquet, des détenus cohabitent à quatre dans des cellules de 9 m2, ou à cinq dans 12 m2.. "Avec la chaleur insoutenable, la promiscuité entraîne beaucoup de conflits, de violence et d'insultes", déplore un détenu dans sa plainte datée du 30 juin. Les cellules sont enfumées et il n'y a aucune place pour les non-fumeurs." Un autre se plaint d'être enfermé avec "un fou dangereux qui n'a rien à faire en prison et devrait être soigné par un médecin". Mais, dans l'établissement, le nombre de détenus empêche de voir le psychiatre plus d'une fois par mois.

La promiscuité, c'est aussi vivre en permanence avec les mauvaises odeurs. Celles des toilettes, séparées du reste de la pièce par une cloison sans porte qui ne monte pas jusqu'au plafond : "Chacun a droit au bruit et aux odeurs qui se répandent dans la pièce, puisqu'il n'y a pas de système d'aération ou de ventilation", soulignent tous les plaignants. Des draps sont alors tendus pour préserver un peu d'intimité. Il y a aussi les odeurs de la grosse poubelle, qui n'est pas vidée chaque jour. Les détenus doivent en effet acheter les sacs plastique, et attendent qu'ils soient bien remplis pour s'en débarrasser.

Les problèmes d'hygiène reviennent dans tous les témoignages. Plusieurs plaignants citent "les champignons et les moisissures" sur les murs des douches, accessibles seulement trois fois par semaine, même pendant les grosses chaleurs. L'eau, qui n'est pas potable en raison de la vétusté des canalisations, doit être achetée par les prisonniers. Enfin, en raison de l'état du plancher, "il suffit que des détenus du deuxième étage fassent le lavage de leur cellule pour que ceux du premier soient inondés", rapporte un détenu, pour qui "ce n'est pas une vie".

La surpopulation de la maison d'arrêt empêche par ailleurs de nombreux détenus d'accéder aux activités sportives ou aux différents ateliers, accordés aux plus méritants. "Tous les cours sont pleins et ils s'arrêtent pendant l'été, se plaint l'un d'eux. Il n'y a aucune activité autre que le sport et la promenade, 1 h 30 le matin et 1 h 30 l'après-midi. Alors on reste dans la cellule toute la journée."

A l'extérieur, la cour de promenade de 18 mètres sur 10 est "trop petite pour tous les détenus", poursuit-il. Certains y ont vu "des rats remonter parfois de l'égout". Construite sans banc, sans abri et sans urinoir, la cour empeste dès les premières chaleurs, parce que les détenus y sont contraints d'uriner le long des murs.

Alexandre Garcia
· ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 19.07.03[/quote]
magdalene
 
Message(s) : 0
Inscription : 06 Fév 2003, 12:29


Retour vers Presse et communiqués

Qui est en ligne ?

Utilisateur(s) parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 3 invité(s)

cron