Babangida, le "génie du mal", veut revenir au pouv

Message par Combat » 11 Nov 2006, 18:02

LAGOS (AFP) - samedi 11 novembre 2006 - 12h51 - Il s'est qualifié lui-même un jour de "génie du mal", la presse l'a surnommé "Maradona" pour son art consommé de dribbler ses adversaires: l'ancien dictateur militaire nigérian Ibrahim Badamasi Babangida, alias IBB, veut reconquérir en 2007 le fauteuil présidentiel qu'il avait occupé de 1985 à 1993.
A 65 ans, le général-président en retraite a décidé de briguer l'investiture de son parti, le PDP (au pouvoir) pour succéder à un autre général, Olusegun Obasanjo, revenu en civil à la présidence en 1999 et qui se retirera en mai après deux mandats consécutifs.

Très riche et toujours puissant, IBB, un musulman haoussa de l'Etat du Niger (centre-nord), est sans doute l'un de ceux dont le passage à la tête du pays a été le plus marquant et le plus sujet à controverse depuis l'indépendance, en 1960. Il reste en tout cas aujourd'hui le plus pur exemple nigérian du "politicien-soldat".

Ce militaire formé en Grande-Bretagne, en Inde et aux Etats-Unis était arrivé au pouvoir à 44 ans en août 1985 par un coup d'Etat sans effusion de sang contre le général Muhammadu Buhari. Il l'a quitté huit ans plus tard, après une interminable transition, deux mois après avoir annulé la présidentielle remportée par un riche homme d'affaires, magnat de la presse, Moshood Abiola.

Pour mesurer son influence treize ans plus tard, il suffit de regarder la liste des invités qui se sont pressés récemment au mariage de sa fille: 20.000 personnes, des anciens chefs d'Etat, 31 gouverneurs d'Etats de la fédération nigériane sur 36, 132 députés nationaux...

Inutile de dire qu'il a aujourd'hui beaucoup d'obligés dans le monde des affaires et des "parrains" de la politique. Sous son règne, de nombreux Nigérians, mais aussi des Libanais, des Israéliens et des Indiens se sont retrouvés millionnaires du jour au lendemain.

"Je peux mourir pour lui", assurait récemment dans les médias Alex Akinyele, son ancien ministre de l'Information.

Ses détracteurs soulignent que l'ère IBB a été marquée par une corruption effrénée, et l'accusent d'avoir dilapidé ou volé quelque 12 milliards de pétrodollars dans les caisses du pays, le 6ème exportateur mondial d'or noir.

Son fils a été brièvement interpellé en août dernier par la Commission anti-corruption, soupçonné de malversations.

"Si Dieu était nigérian, Babangida aurait essayé de le soudoyer", selon le mot d'un éditorialiste. "Il a érigé la culture de corruption en marque du génie national", commentait un autre il y a quelques années.

Une chose est sûre, depuis qu'il est en politique, IBB ne fait jamais les choses à moitié. "Mr Courage", comme l'ont surnommé ses camarades de promotion de l'Académie militaire de Zaria, dans l'Etat de Kaduna (nord), a par exemple bravé en 1986 un gros risque d'impopularité en mettant en oeuvre un plan d'ajustement structurel dicté par le FMI et la Banque Mondiale.

Pour se maintenir au pouvoir et museler toute contestation civile ou militaire, il n'a pas hésité à faire arrêter des centaines de civils. Il a même fait fusiller un vieil ami, le général Mamman Vatsa, avec des dizaines de militaires qu'il soupçonnait de préparer un putsch.

Il a encore fait exécuter des dizaines de civils et de militaires après une tentative ratée de coup d'Etat, en avril 1990.

Autre tache sur son blason: l'assassinat, un an et deux mois après son arrivée au pouvoir, du rédacteur en chef de l'hebdomadaire Newswatch, Dele Giwa.

IBB a également marqué de son empreinte l'histoire du pays en créant en 1991 neuf nouveaux Etats dans la fédération, et en instituant un système de partis à l'américaine avec seulement deux formations, une pour le pouvoir, une pour l'opposition.

Alors que le pays s'apprête à vivre la première transition entre civils de son histoire, la tentative de retour de l'ex-dictateur, qui se pose en homme nouveau, en dit long sur le poids de l'institution militaire au Nigeria, et sur la fragilité de l'expérience démocratique du pays.
Combat
 
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