Source: Informations Ouvrières N° 732, semaine du 1er au 7 mars 2006
La “concurrence libre et non faussée” : la preuve par GDF
Prenant prétexte d’une menace d’OPA (1) sur Suez, groupe privé, le gouvernement annonce précipitamment, ce 25 février, la « fusion » avec GDF, complétant ainsi la privatisation de ce qui fut, avec EDF, une entreprise nationale conquise en 1946, une des fiertés du service public en France.
Suez est une entreprise dont 70 % des actions sont des capitaux flottants, c’est-à-dire qui se vendent et s’achètent sur les marchés, notamment par les fonds spéculatifs américains. Et c’est à cette sauce que l’on veut manger GDF, puisque, après la fusion, les actionnaires de Suez détiendront plus de 56 % des actions de la nouvelle société.
Du coup, GDF privatisé deviendrait le premier concurrent d’EDF au compte des fonds de pension américains, tandis que les quelque 280 000 agents EDF-GDF verront leur statut remis en cause. Et demain, avec quel requin devra « s’allier » EDF pour se « protéger » d’une nouvelle OPA ?
Hier encore, il existait une entreprise nationale publique EDF-GDF, qu’on a scindée en deux. GDF absorbé par Suez, et demain EDF ? Derrière ce qui peut sembler absurde, il y a une logique, une logique destructrice.
Le trust allemand de l’électricité Eon vient de lancer une OPA sur l’espagnol Endesa. « L’Union européenne se déchire désormais sur les OPA », constatent Les Echos (28 février).
Le gouvernement espagnol s’en prend aux Allemands, les Italiens menaceraient les Français… au détriment des travailleurs de toute l’Europe. L’Union européenne, que les partisans du traité de Maastricht nous présentent comme le rempart contre la guerre et l’instrument de l’unité de tout un continent, apparaît aujourd’hui comme ce qu’elle est : l’outil de la dislocation des économies et des nations.
Ce à quoi on assiste, c’est à une véritable liquidation de l’industrie dans tous les pays, y compris dans les pays de l’est de l’Europe, à qui on a fait payer ce prix pour pouvoir entrer dans l’Union européenne. Des millions de travailleurs y ont été jetés à la rue, leurs droits, leurs protections sociales liquidés. Ils ont été réduits à une masse taillable et corvéable à merci, qui, aujourd’hui, est disponible pour les « délocalisations » menées de l’ouest de l’Europe, où, à leur tour, des millions de travailleurs sont jetés à la rue.
Tel est le résultat immédiat, direct, du principe de « concurrence libre et non faussée » inscrit dans le marbre du traité de Maastricht, dont découlent toutes les directives européennes, qui sont à la source de la privatisation d’EDF-GDF, ou encore du « contrat première embauche ».
L’Union européenne est une formidable machine destructrice, qui a pour objectif de diviser les peuples, d’opposer les classes ouvrières mises en concurrence les unes contre les autres.
La « vieille Europe » que raille George Bush a surgi des plus grandes confrontations de l’histoire, mais aussi des révolutions et des luttes de classes qui ont abouti à des acquis, des droits et des garanties insupportables pour les fonds spéculatifs américains, qui y voient autant de « barrières protectionnistes ». Et, précisément, la fonction de l’Union européenne est de les faire sauter.
Mais les travailleurs et les peuples d’Europe, de toute l’Europe, veulent vivre face à la liquidation économique et sociale qu’engendre l’Union européenne.
Une issue existe, elle est dans la volonté qui est commune, n’en doutons pas, aux travailleurs et aux peuples, qui refusent la déchéance et la misère. C’est là le sens du vote non des peuples de France et des Pays-Bas exprimant les aspirations de tous les peuples d’Europe.
A Berlin, des délégués venus de 15 pays de l’est et de l’ouest de l’Europe, en jetant les bases de l’Entente européenne des travailleurs et des peuples, ont affirmé : « L’Europe des peuples, l’union libre des peuples libres d’Europe, ne peut se construire qu’en rompant avec toutes les institutions de l’Union européenne, qui constituent un instrument entièrement au service des multinationales, des spéculateurs financiers et des fonds d’investissements dominés par les groupes américains. »
N’est-ce pas la voie de l’avenir ?
Lucien Gauthier
(1) Offre publique d’achat (OPA) : c’est l’opération par laquelle une entreprise, une banque ou toute autre firme financière offre de racheter les actions boursières d’une entreprise cible à un prix donné. Une OPA est dite « amicale » lorsque l’OPA a l’accord de la direction de l’entreprise cible. Elle est dite « hostile » dans le cas contraire.
Mais aussi, dans Informations Ouvrières de cette semaine...
Note IO 732 – note 48
La une du journal titre : Air France, autoroutes, France Telecom...Et maintenant, c’est Gaz de France qui est privatisé, livré aux spéculateurs. Que va-t-il rester de ce pays ?
Au sommet européen de Lisbonne, en 2000, en présence de Chirac et Jospin, la libéralisation de l’énergie a été décidé. Le 25/2, acceptant le diktat de l’Union européenne, le gouvernement décide la privatisation-destruction de Gaz de France, qui entraînera celle d’EDF. A la clef, c’est la suppression de 250 000 emplois programmée dans le secteur de l’Energie, et la liquidation des derniers acquis et de ce qui reste des statuts des personnels. Voilà un nouvel exemple de la signification de la « concurrence libre et non faussée » voulue par l’Europe de Maastricht.
La Page 2 publie un interview d’un agent EDF-GDF d’Issy(92), des extraits d’un tract du syndicat CGT de la direction informatique et télécommunications (« Le 7 mars, répondre massivement à la grève interprofessionnelle ! retour aux monopoles publics d’EDF-GDF ! », ainsi que des extraits des prises de position de la CGT, du PCF, de dirigeants du PS, qui ont tous en commun de ne pas demander le renationalisation d’EDF-GDF, et de passer sous silence la responsabilité de l’Union européenne.
La page 3 consacre un article au démantèlement du ministère de l’Education nationale (en faisant le lien avec la LOLF) ;
un article sur la liquidation de la fac de Censier, dont des étudiants sont désormais parqués près d’une gare, dans des locaux sans fenêtres, en sous-sol sans lumière naturelle - avec l’appel du collectif du CVSE de Censier appelant les étudiants à se joindre à la grève interprofessionnelle du 7 mars ; un article qui revient sur la LCR et le « comité de liaison de la gauche ».
La page 4 est exclusivement axée sur la préparation de la grève interprofessionnelle du 7 mars. IO publie notamment le communiqué commun des UD CGT et FO de l’Eure, des appels communs de sections syndicales d’enseignants, la lettre d’un syndiqué de la FSU (avec un état des syndicats de la FSU qui appelle au 7), et un reportage relatant des discussions dans un centre de sécu et dans un hôpital sur le 7 mars.
Les pages 5, 6 et 7 sont consacrées à la préparation de la convention nationale des 27 et 28 mai.
La page 5 donne la parole à 4 élus, membres du bureau permanent, qui ont participé à la conférence de Berlin.
La page 6 rend compte de la visite des maires dans la Meuse, publie une contribution de Gilles Boulin (MRC), membre du bureau permanent, le cahier de doléances du maire de Pinay(42), membre du bureau permanent, ainsi que d’un appel de 5 maires à leurs collègues : « Organisons-nous pour résister, défendre et reconquérir la laïcité », exigeant entre autre l’abrogation de la loi de 2004.
La page 7 rend compte des mandats de délégués à la convention nationale : Sotteville les Rouen (9 cheminots désignent leur premier délégué), lycée professionnel Barrault (Paris XIIIe), Essonne (rassemblement le 25/2 devant la préfecture),
Côte d’Or (interview d’un délégué, sur la campagne du comité départemental contre la fermeture de l’hôpital de Dijon), compte rendu de la réunion du 23/2 de métallurgistes des Yvelines.
Les pages 8 et 9 donnent des premiers éléments d’informations sur la conférence de Berlin (25 et 26 février), où 200 délégués de 15 pays (41 intervenants dans la discussion) y ont participé. La conférence a adopté une « Adresse aux travailleurs et peuples d’Europe », dont IO publie de larges extraits (le texte intégral sera publié dans Informations internationales), qui propose la constitution d’une « Entente européenne des travailleurs et des peuples ».
Dans les prochains numéros, IO poursuivra la publication d’interventions de délégués, des interviews et des contributions pour l’Entente européenne des travailleurs et des peuples.
La page 10, consacrée à la santé-sécu, publie un article sur la convention médicale. Alors que la convention médicale pour 2005, fixait l’objectif de 998 millions d’euros d’économies sur le dos des malades, celle prévue pour 2006 va encore plus loin (tableau 2005 et 2006 publiés) ; la 2e partie de l’article sur la déontologie médicale, et un article sur le livre vert de la Commission européenne concernant la santé mentale.
La page 11 est centrée sur la vie du parti ; Ils rejoignent le Parti des travailleurs : Aulnay (93), Val d’Oise, Alpes-Maritimes ; tract de la commission cheminot du PT, et le témoignage d’un jeune chômeur paru dans le supplément IO Finistère.
Les pages 12 et 13 : pages Inter. Extraits de l’édito de L. Hanoune dans le dernier numéro de Fraternité, organe du P.T. d’Algérie : « Pour la renationalisation des hydrocarbures ». Article sur la préparation des manifestations aux USA, dont le point culminant sera celle du 29 avril à New-York pour exiger la fin de la guerre contre l’Irak, et celle sur le sol même des USA contre la classe ouvrière américaine. Un article sur la Palestine.
Page 13 : interview de Tafazzul Hussein, président de la fédération nationale des travailleurs du Bangladesh, au sujet de la préparation de la rencontre internationale pour les droits ouvriers en Asie, qui se tiendra les 5 et 6 mars à New Delhi, ainsi qu’une contribution de militants syndicalistes du Pakistan et du Bangladesh.
Page 14 : tribune des courants, avec un interview de Marc Dolez (député socialiste du Nord) paru dans le N°140 de Réflexions paru la semaine dernière, et des extraits des notes éditoriales du N°48 de La Vérité qui vient de sortir.
Page 15 : Le panorama d’Angelo Geddo.
Page 16 : appel d’employés et cadres de la Sécu invitant au meeting du 8 mars de la RP, organisé par le comité national pour la reconquête de la démocratie, et le témoignage d’une caissière d’un super-marché (95) versé au meeting du 8.
Article sur l’épidémie de chikungunya à La Réunion : « Une conséquence du démantèlement du service public ». Selon un journal de La Réunion : depuis 2003, en raison des départs massifs à la retraite, perte de 42% des effectifs de la DRASS, dont l’un des services avait permis d’éradiquer le paludisme il y a 50 ans... Et le manque de lits, qui ont été fermés ces dernières années dans les hôpitaux.
Un billet de Pierre Lambert sur l’assassinat d’Ilan Halimi.