Informations ouvrières N° 725 - Semaine du 12 au 18 janvier 2006
“Une autre époque” : laquelle ?
Ce n’est pas nous qui le disons : « Une situation catastrophique. » Ce sont les termes employés par le président du conseil général de Seine-Saint-Denis, rapportés par Le Parisien (10 janvier) : « 130 millions d’euros manquent pour équilibrer les comptes. En cause : la décentralisation. »
Pour ce seul département, transfert du RMI, de 300 agents de la DDE, de 1 100 techniciens et ouvriers de service (TOS) de l’Education nationale, de la prestation d’autonomie pour les personnes âgées, etc. : c’est un véritable démantèlement des services publics et de la République ! Chacun le sait : les transferts, c’est la « réforme de l’Etat » (en fait, son explosion) en application des directives européennes.
Avons-nous tort de dire : retour aux services publics de tout ce qui est privatisé, retour à la République de ce qui est transféré, retour à la démocratie, rupture avec l’Union européenne ?
Autre département, encore une fois, ce n’est pas nous qui le disons : « Tout s’est bien passé, mais on se croirait à une autre époque... Une maman a accouché le long de l’autoroute hier, faute d’avoir pu rallier à temps une maternité... Pour cette femme domiciliée à Cherré, près de La Ferté-Bernard, c’est dans la Ford Escort du papa, à hauteur de la barrière de péage d’Auvours, que le bébé est venu au monde... Avec les conditions d’hygiène et les mesures de sécurité que l’on imagine, autrement dit, aucune... Lorsque les gendarmes sont arrivés, le père était en train de déposer sa deuxième fille sur le ventre de son épouse... Arrivés bien après l’accouchement, les médecins du SMUR ont transporté la maman et l’enfant à la maternité du centre hospitalier du Mans... Rappelons qu’il n’y a plus de maternité ni à La Ferté-Bernard ni à Nogent-le-Rotrou... Dans cette deuxième ville, c’est sur un parking de supermarché qu’une maman avait dû accoucher il y a quelques mois » (entendu sur Val d’Huisne FM, radio locale de la Sarthe, le 28 décembre 2005).
Faut-il le rappeler : il y avait 1 369 maternités en France en 1975, il n’y en avait plus que 649 au 31 décembre 2004.
Faut-il le rappeler : la croissance du nombre de maternités (et de services hospitaliers) s’est particulièrement accélérée avec l’instauration de la Sécurité sociale en 1945, Sécurité sociale garantissant l’accès aux soins pour tous et toutes.
Faut-il le rappeler : la disparition (plus de 50 % !) des maternités s’est accélérée depuis l’instauration des critères de Maastricht, enfermant les dépenses de santé dans une enveloppe fermée. Et aujourd’hui, le gouvernement veut aller jusqu’au bout de cette contre-réforme dictée par Bruxelles en coupant définitivement le financement de la Sécurité sociale du salaire (lire pages 8 et 9).
« On se croirait à une autre époque », dit le journaliste. Il a raison. Quelle époque ? L’époque où les femmes accouchaient chez elles, dans les champs, dans les usines ? L’époque de la barbarie, sans droits ni garanties ?
C’est cela, l’avenir que préparent l’Union européenne et toutes les institutions du système de la propriété privée des moyens de production. Cet avenir, les femmes, les hommes, les jeunes ne peuvent que le rejeter et le combattre.
L’avenir des droits et de la civilisation passe par la rupture avec l’Union européenne.
C’est cette exigence qui rassemblera le 18 janvier prochain tous les participants au meeting convoqué par le Comité national pour la reconquête de la démocratie politique.
Daniel Gluckstein