a écrit :Referendum constitution 2005
L0: non en solo plutôt que mal accompagné
Lutte ouvrière fait sa fête, avec la volonté de ne pas se mêler aux autres adversaires de gauche du traité.Par Christophe FORCARI
lundi 16 mai 2005
«Réveille-toi ! Ça va être au tour d'Arlette !» Après les seaux d'eau de la journée de samedi, quelques-uns profitent des rayons du soleil hier après-midi pour piquer un roupillon sur la pelouse de la place de la Révolution, face au grand podium. Comme chaque année, Lutte ouvrière tient sa fête en son château de Presles (Val-d'Oise). «Le plus grand rassemblement du non à la Constitution», selon sa porte-parole, Arlette Laguiller. Trois jours et trois discours (le dernier aujourd'hui), sans tenir compte du rabiotage d'un jour de week-end de Pentecôte décidé par Raffarin. Et sans pour autant mélanger les torchons et les serviettes.
Pour Arlette Laguiller, ce n'est pas parce que Laurent Fabius appelle au non qu'il serait devenu subitement «un ami des travailleurs. Vous ne verrez à cette tribune ni Emmanuelli, ni Mélenchon, ni Chevènement».
Quitte à être inaudible, la formation trotskiste prêche son non en solo. Au contraire des autres, assure Arlette Laguiller, «nous n'appelons pas à voter non pour créer une hypothétique dynamique unitaire, pour faire surgir, à partir de tous ceux qui, à gauche, votent non, ce qui ne pourrait être qu'une nouvelle dénomination pour un éventuel gouvernement de gauche qui se révélera aussi décevant pour les travailleurs» que les précédents.
Pas l'ombre d'une alternative optimiste à l'horizon, pour LO, noir c'est noir, et non c'est non ! En tête de liste des suspects qui nourriraient de sombres desseins pour décrocher un strapontin dans un gouvernement de gauche plurielle «new fashion» : les «zigotos» de la LCR, comme les surnomme Robert Barcia, alias «Hardy», 77 ans, chef incontesté de LO. Et juste derrière, Marie-George Buffet, soupçonnée de vouloir s'accaparer les bulletins des classes populaires en faveur du non. Pour Arlette Laguiller, «la position du PCF et de Marie-George Buffet n'est pas claire sur l'avenir. Si le oui l'emporte, ils iront vers les tenants du oui au sein du PS. Le PCF n'a pas d'autres perspectives qu'une nouvelle union de la gauche». En clair, le PCF serait prêt à vendre le vote «non» pour un plat de «petit salé aux lentilles», plat proposé dans un des stands du «Village médiéval» de la fête.
Laguiller ne croit pas plus à «un pôle de radicalité qui irait de Fabius à Besancenot». Du coup, le débat traditionnel qui oppose responsables de la LCR à ceux de LO a été ramené, cette année, à sa plus simple expression. Aucun des membres du bureau politique des deux organisations n'y a participé. Et le «Village politique», où la Ligue occupe le plus grand stand, a été déplacé pour se retrouver confiné dans un endroit difficile à trouver, sur l'aile droite du château. «Normal pour des trotskistes d'être exilés en Sibérie», plaisantait un militant de la LCR. La consigne de voter non à la Constitution, donnée clairement pour la première fois par LO à l'occasion d'un scrutin ayant trait à l'Europe, ne fait d'ailleurs pas l'unanimité dans la formation d'extrême gauche. La fraction oppositionnelle constituée au sein de LO a voté contre lors du dernier congrès. «Un vote à 10 % contre la ligne officielle dans un congrès de LO, c'est énorme !» confie un ex de LO exclu en 1997. Enorme peut-être, mais toujours discret.
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