Août 1944 : l'insurrection de Varsovie

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par pelon » 05 Août 2004, 13:59

a écrit :
Anniversaire : Août 1944 - Les Alliés laissaient Hitler écraser Varsovie

Après les cérémonies commémorant le 60e anniversaire du débarquement allié de juin 1944 en Normandie et avant celles qui auront lieu en Provence, le 15 août, celles du 60e anniversaire de l’insurrection de Varsovie ont à nouveau rassemblé, début août, le même public de dirigeants et chefs d’État.

À cette occasion, la télévision, la radio et la presse ont rappelé comment, durant deux mois, les insurgés polonais, dirigés par les nationalistes de l’AK (Armia Krajowa, «armée de l’intérieur» en polonais), avaient tenu tête à l’armée allemande qui, après les avoir écrasés, laissa Varsovie en cendres.

Deux cent mille combattants et civils polonais furent tués dans cette lutte inégale. Bien que reculant sur tous les fronts en Europe, l’armée allemande gardait encore sinon toute sa puissance, en tout cas celle de réduire des insurgés mal armés. Les chefs de l’AK n’ignoraient rien de la disproportion des forces en présence. Mais ils avaient fait le pari que, ayant pris pied en France, les Alliés voudraient leur venir en aide. Car si les dirigeants nationalistes polonais s’apprêtaient à affronter militairement les troupes allemandes, politiquement ils s’opposaient à l’URSS de Staline, dont les forces approchaient de Varsovie. Et ils n’entendaient nullement laisser l’armée russe entrer dans une ville toujours occupée, mais au contraire dans une capitale de la Pologne qui, s’étant libérée elle-même, ne serait pas, espéraient-ils, livrée à ses vainqueurs.

Les dirigeants de l’AK n’avaient nul besoin de rappeler à la population polonaise comment, en 1939, Hitler et Staline s’étaient partagé la Pologne en la rayant de la carte. Et cela ne dut guère les surprendre que l’armée soviétique, parvenue devant Varsovie, ait reçu l’ordre de Staline de ne plus avancer, ce qui laissait les mains libres à Hitler. En revanche, leur nationalisme et leurs idées réactionnaires aveuglaient les dirigeants de l’AK quant à ce que l’aide que les Alliés occidentaux voudraient leur accorder.

Un an auparavant, quand les SS avaient écrasé l’insurrection du ghetto juif de Varsovie, les nationalistes polonais n’avaient, dans le meilleur des cas, pas bronché. À l’époque, les dirigeants alliés, eux aussi, n’avaient non seulement pas levé le petit doigt (et ils auraient eu de tout autres moyens d’agir que la résistance polonaise), mais ils imposèrent le silence, tout au long de la guerre, aux services officiels américains et britanniques quant à l’horreur de la «solution finale» où périrent six millions de Juifs d’Europe sous les coups de leurs bourreaux nazis.

Cet été en Pologne, malgré le consensus hypocrite habituellement de mise dans de telles commémorations, certains ont rappelé qu’en août 1944, si l’armée de Staline restait l’arme au pied sur la rive est de la Vistule quand les SS écrasaient Varsovie, les Alliés occidentaux n’avaient guère tenté que de rares largages de vivres et munitions aux insurgés, alors que leur aviation bombardait quotidiennement les villes allemandes.

Le représentant américain aux cérémonies officielles de Varsovie, Colin Powell, a déclaré que les accords de Yalta avaient été une «erreur». Une façon de laisser entendre que les dirigeants américains de l’époque se seraient trompés en s’entendant avec Staline, alors que la conférence de Yalta entre puissances impérialistes et bureaucratie stalinienne n’était qu’un accord entre brigands, autant alliés contre les peuples que rivaux entre eux.

En effet, les dirigeants de la bourgeoisie mondiale et ceux de la bureaucratie russe réactionnaire ne savaient que trop bien comment, à peine une génération auparavant, la fin de la Première Guerre mondiale avait donné naissance à des soulèvements populaires et révolutions ouvrières dans bien des pays, et pas seulement en Europe. C’est contre la répétition de tels événements qu’ils avaient voulu se prémunir: à Yalta, où ils avaient divisé l’Europe en zones où chacun serait chargé du maintien de l’ordre, mais aussi par des bombardements systématiques des populations «ennemies» comme «alliées», des bombardements «aveugles» prétendent certains historiens, alors qu’ils visaient tout particulièrement les villes, là où se trouvait concentré le prolétariat.

Car ces Alliés, qui se présentaient comme des «libérateurs», craignaient comme la peste tout ce qui, de près et même de loin, pouvait mettre en branle des masses qu’ils n’auraient pas étroitement contrôlées. D’ailleurs, au moment même où éclatait l’insurrection de Varsovie, à l’autre bout de l’Europe cette fois, devant Paris insurgé, les troupes américaines avaient reçu l’ordre de contourner la ville sans y entrer. Et si Paris n’a pas connu le sort de Varsovie, c’est que de Gaulle avait à sa disposition la division blindée de Leclerc et que ce général, tout aussi réactionnaire et nationaliste que les dirigeants de l’AK polonaise, a pu, non sans mal, convaincre les dirigeants politiques et militaires de la bourgeoisie américaine qu’il saurait maintenir l’ordre en France.

Pierre LAFFITTE

Lutte Ouvrière n°1879 du 6 août 2004
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Message par Combat » 06 Sep 2006, 05:46

Sans vouloir defendre l'acte de staline et de ses allies, il ne faut pas oublier ce qu'etait l'AK, c'est a dire des antisemites notoires en paroles et actes et des semi-fascisants qui avaient souhaite au debut faire alliance avec les nazis.. ll y a tres longtemps j'ai lu un bouquin de Martin Gary"Au nom de tous les miens"(lui meme rescape des camps de concentration devint officier du NKVD puis emigrera a l'ouest pour devenir un reac) qui racontait l'etat d'esprit de l'AK. Seule l'AL(Armee "Lujowa" de gauche pro sovietique) qui essaya de soutenir l'insurrection du Ghetto a eu une une position digne en 43/44.
Combat
 
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Message par Ottokar » 06 Sep 2006, 07:25

(Combat @ mercredi 6 septembre 2006 à 06:46 a écrit : Sans vouloir defendre l'acte de staline et de ses allies, il ne faut pas oublier ce qu'etait l'AK..
.. mais Staline, tu le défends quand même ! Suppose que l'armée US se soit arrêtée tranquillement à Chartres 8 ou 15 jours en août 44 et imagine un peu le massacre ! Est-ce que tu écrirais sereinement 60 ans après "sans excuser le geste d el'armée US, il faut rappeler que la "Résistance" de De Gaulle visait à réinstaurer un Etat bourgeois en recyclant l'appareil antisémite et anticommmuniste de Vichy, et que même la résistance du PC était gangrénée de nationalisme et d'aligement derrière De Gaulle", etc. ?

Les calculs sordides de Staline laissant cyniquement massacrer la résistance polonaise, dominée par des gens fort peu à gauche c'est sûr, n'a pas dû lui faire des amis dans la population de Varsovie martyrisée !
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Message par yannalan » 06 Sep 2006, 09:07

Pour répondre à Combat, oui, l'AK était un mouvement de masse qui épousait les préjugés de la société polonaise de l'époque. La bonne droite, dirait-on. De là à en faire une organisation fasciste et antisémite, ça va loin quand même. Gray était officier du NKVD comme tu dis, il devait avoir à mon avis une vision un peu faussée... Il y avait des services dans l'AK qui s'occupaient su sauvetage des juifs, même si ce n'était pas une activité de masse.
Il faut aussi voir que l'oppression que subissaient les polonais était très dure, par rapport à la France ou à la Belgique par exemple. L'Armija Ludowa était assez groupusculaire. Pour ce qui est du soulèvement du ghetto, il était évident que c'était un baroud d'honneur sans espoir et qu'il n'aurait servi à rien aux polonais de déclencher les combats. Par contre, las alliés auraient pu perturber les transports ferroviaires vers les camps ou prendre d'autres mesures.
La différence entre l'insurrection du ghetto et celle de Varsovie, c'est que justement dans le second cas, les libérateurs arrivaient à proximité.
Le résumé des courses, ce sont des dizaines de miliers de tués. Ca n'a pas arrangé la popularité des soviétiques qui était déjà très basse depuis des siècles...
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Message par Combat » 06 Sep 2006, 13:30

Je n'ai jamais dit que je defendais le fait que les staliniens aient laisse massacrer la resistance polonaise aux portes de Varsovie mais comparer la resistance gaulliste a l'AK c'est un peu fort. Ce que je dis n'est pas juste base sur l'histoire de Gary mais sur une multitude de temoignages.
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Message par yannalan » 06 Sep 2006, 15:40

Ce qui est sur, c'est que l'AK était antisoviétique, et même anti-russe. Vu l'histoire de la Pologne, c'est le contraire qui aurait été étonnant.Par rapport aux gaullistes en France, s'il y avait une différence, c'était celle du nombre de combattants, bien plus faible en France.
Le pouvoir de Varsovie à la fin de la guerre a taillé un costard à l'AK, en en faisant une orga semi-fasciste. Bourgeoise, oui, c'est sur. On n'est pas obligés de tout amalgamer.
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Message par Serp i Molot » 09 Sep 2006, 01:44

Selon l'historien gaulliste Paul Marie de la Gorce, l'Armée Rouge n'a pas pu intervenir à Varsovie à cause d'une contre-offensive allemande.

Rappelons aussi que l'URSS n'a fait que récupérer suite à la seconde guerre mondiale le territoire que les polonais avaient volé au début des années 20.
Serp i Molot
 
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Message par Combat » 09 Sep 2006, 02:38

(Serp i Molot @ samedi 9 septembre 2006 à 02:44 a écrit :
Rappelons aussi que l'URSS n'a fait que récupérer suite à la seconde guerre mondiale le territoire que les polonais avaient volé au début des années 20.
Vraiment pitoyable. Tu sais faire une analyse de classe toi?
Combat
 
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Message par Ottokar » 09 Sep 2006, 09:08

"récupéré des territoires"... cette façon de poser les problèmes est indigne du rouge du drapeau de Serp i Molot. Un pouvoir ouvrier ne récupère pas de territoires, laissons cela aux appétits des pillards, des seigneurs, des nobles ou des bourgeois, mais fédère des peuples qui veulent vivre ensemble.

Lénine a quasiment dicté à Staline une excellente brochure sur le droit des peuples à disposer d'eux mêmes, avant la révolution... avant que Staline, après la mort de Lénine et le bannissement de Trostky ne les massacre, et ne déporte des peuples entiers !
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Message par yannalan » 09 Sep 2006, 09:18

Pour éclairer l'intervention de Serp i Molot (ce qui ne veut pas dire l'approuver), les territoires ocdupés par les soviétiques en 45 étaient en majorité peuplés d'ukrainiens et de biélorusses et avaient été occupés en 1920 par les polonais de façon tout aussi "cavalière".

Tout ça n'empêche pas que ni la première fois ni la deuxième on n'a consulté les populations locales
yannalan
 
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