Qu'est-ce que la dialectique?

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par logan » 22 Mai 2004, 20:36

Extrait de Défense du marxisme, un texte de Trotsky de 1940 qui expose la dialectique marxiste :

a écrit :La dialectique n'est ni une fiction ni une mystique mais la science des formes de notre pensée, quand cette pensée ne se limite pas aux soucis de la vie quotidienne mais tente d'appréhender des processus plus durables et plus complexes. La dialectique est à la logique formelle ce que, disons, les mathématiques supérieures sont aux mathématiques élémentaires.

Je vais tenter ici de cerner, sous la formé la plus dense possible, l'essentiel de la question. Dans la logique aristotélicienne le syllogisme simple part de A = A. Cette vérité est acceptée comme un axiome pour quantité d'actions pratiques humaines et pour des généralisations élémentaires. En réalité A n'est pas égal à A. C'est facile à démontrer ne fut-ce qu'en regardant ces deux lettres à la loupe: elles diffèrent sensiblement. Mais, dira-t-on, il ne s'agit pas de la grandeur et de la forme des lettres, c'est seulement le symbole de deux grandeurs égales, par exemple une livre de sucre. L'objection ne vaut rien: en réalité une livre de sucre n'est jamais égale à une livre de sucre: des balances plus précises décèlent toujours une différence. On objectera : pourtant une livre de sucre est égale à elle-même. C'est faux: tous les corps changent constamment de dimension de poids de couleurs etc., et ne sont jamais égaux a eux-mêmes. Le sophiste répliquera alors qu'une livre de sucre est égale a elle-même "à un instant donné". Sans même parler de la valeur pratique très douteuse d'un tel "axiome", il ne résiste pas non plus à la critique théorique. Comment en effet comprendre le mot "instant" ? S'il s'agit d'une infinitésimale fraction de temps, la livre de sucré subira inévitablement des changements pendant cet "instant". Ou bien l'instant n'est il qu'une pure abstraction mathématique, c'est-à-dire représente un temps nul? Mais tout ce qui vit existe dans le temps; l'existence n'est qu'un processus d'évolution ininterrompue; le temps est donc l'élément fondamental de l'existence. Et l'axiome A=A signifie que tout corps est égal a lui même quand il ne change pas, c'est-à-dire quand il n'existe pas.

Au premier abord il peut sembler que ces "subtilités" ne sont d'aucune utilité. En réalité elles ont une importance décisive. L'axiome A=A est d'une part la source de tout notre savoir, de l'autre la source de toutes nos erreurs. On ne peut impunément manier l'axiome A=A que dans des limites déterminée. Quand la transformation qualitative de A est négligeable pour la tâche qui nous intéresse, alors nous pouvons admettre que A=A. C'est le cas par exemple du vendeur et de l'acheteur d'une livre de sucre. Ainsi considérons-nous la température du soleil. Ainsi considérions-nous récemment le pouvoir d'achat du dollar. Mais les changements quantitatifs, au-delà d'une certaine limite, deviennent qualitatifs. La livre de sucre arrosée d'eau ou d'essence cesse d'être une livre de sucre. Le dollar, sous l'action d'un président, cesse d'être un dollar. Dans tous les domaines de la connaissance, y compris la sociologie, une des tâches les plus importantes consiste à saisir à temps l'instant critique où la quantité se change en qualité.

Tout ouvrier sait qu'il est impossible de faire des objets absolument identiques. Pour l'usinage des cônes de roulement à bille on admet un certain écart inévitable, mais qui doit rester dans certaines limites (c'est ce qu'on appelle la tolérance). Tant que l'on se tient dans les limites de la tolérance, les cônes sont considérés comme égaux (A=A). Si on les franchit, la quantité se transforme en qualité ; autrement dit le cône ne vaut rien ou est inutilisable.

Notre pensée scientifique n'est qu'une partie de notre activité pratique générale, y compris technique. Pour les concepts aussi il y a des "tolérances", établies non par la logique formelle, pour qui A=A, mais par la logique issue de l'axiome selon lequel tout change. Le "bon sens" se caractérise par le fait qu'il franchit systématiquement les normes de tolérance établies par la dialectique.

La pensée vulgaire opère avec des concepts tels que capitalisme, morale, liberté, Etat ouvrier, etc., qu'elle considère comme des abstractions immuables, jugeant que le capitalisme est le capitalisme, la morale la morale, etc. La pensée dialectique examine les choses et les phénomènes dans leur perpétuel changement et de plus, suivant les conditions matérielles de ces changements, elle détermine le point critique au-delà duquel A cesse d'être A, l'Etat ouvrier cesse d'être un Etat ouvrier
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Message par Gaby » 22 Mai 2004, 22:24

T'as pas oublié un bon bout Logan ?
La dialectique, c'est pas ça, tout juste est expliquée une base logique commune à beaucoup de pensées... La dialectique, c'est l'observation à posteriori d'un processus de progrès à travers la dynamique énoncée telle quelle :
- thèse
- anti-thèse qui en est sous-jacente
- synthèse qui n'est pas un compromis mais la résultante de la confrontation.
Bref, un état puis une négation, puis la négation de la négation... et ainsi de suite.

Ainsi, la dialectique de l'histoire est facilement repérable, à travers les oppositions de classe et la négation de la négation qui en résulte à chaque fois.
Gaby
 
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Message par zarta » 28 Juin 2004, 20:52

Moi je croyais simplement que la dialectique c'était l'opposition des choses dans toutes leur complexité (y compris la complexité de cette opposition). :ohmy:
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Message par logan » 06 Août 2004, 22:44

Gaby et Zarta vous avez raison en partie tous les 2.

La nature et la société humaine sont régies par les lois de la la dialectique, logique de la contradiction.

En fait La dialectique est composée de 3 grandes lois d'ou découlent toutes les autres :
- La loi de transformation de la quantité en qualité
- La loi de L'interpénetration des contraires
- La loi de la négation de la négation


Sur la négation de la négation on peut parler de thèse-antithèse-Synthèse, mais cette loi est plus riche et complexe que cela.


Voici un texte vachement bien sur cet outil logique héritée de Hegel qui a servi à Marx pour le capital :

lariposte dialectique
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Message par Gaby » 06 Août 2004, 23:01

Ben j'ai été lapidaire, j'allais pas te résumer la dialectique en 3 lignes sur le détour d'un forum :D
'juste parlé de l'essentiel.
Gaby
 
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Message par logan » 06 Août 2004, 23:16

La dialectique n'ets pas une construction de l'esprit mais une loi à l'oeuvre dans toute la nature, y compris dans les sociétés humaines. Et ce même si on en a pas une conscience claire.
Extrait de Trotsky, lettre ouverte au camarade Burnham, Defense du marxisme 1940
a écrit :Le "dialecticien inconscient".

Reprenant ma remarque sur Darwin, Shachtman a déclaré à votre sujet, m'écrit-on, que vous étiez un "dialecticien inconscient". Il y a un grain de vérité dans ce compliment à double sens. Tout homme est, à un certain degré, un dialecticien et, dans la plupart des cas un dialecticien inconscient. Toute ménagère sait qu'une certaine quantité de sel donne un goût agréable au potage et qu'une poignée de trop le rend immangeable. La paysanne inculte se conduit vis-à-vis de son potage en obéissant à la loi hégélienne de la transformation de la quantité en qualité. On peut tirer une quantité innombrable d'exemples de ce type de la réalité quotidienne. Même les animaux établissent leurs conclusions pratiques non seulement sur la base du syllogisme aristotélicien mais aussi sur la base de la dialectique hégélienne. C'est ainsi que le renard sait que les quadrupèdes et les oiseaux sont nourrissants et ont bon goût. A la vue d'un lièvre, d'un lapin, d'une poule le renard réfléchit : cet être appartient à tel type, qui est savoureux et nourrissant... et il donne la chasse à sa victime. Nous avons là, sous les yeux, l'exemple d'un parfait syllogisme bien que le renard n'ait certainement pas lu Aristote. Cependant lorsque le même renard tombe pour la première fois sur un animal aux dimensions plus grandes que les siennes, par exemple, sur un loup, il se représente très vite que la quantité se transforme en qualité et il se lance à la chasse aux canards. Une chose est claire: les pattes du renard ont des tendances hégéliennes, quoi qu'elles ne soient pas pleinement conscientes. Pour en venir au fait, tout cela montre que les procédés de notre réflexion, tant ceux qui relèvent de la logique formelle que ceux qui appartiennent à la dialectique ne sont pas des constructions arbitraires de notre intellect, mais expriment les rapports réels de la nature même.

logan
 
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Message par youri » 07 Août 2004, 15:55

(Gaby @ samedi 22 mai 2004 à 23:24 a écrit : T'as pas oublié un bon bout Logan ?
La dialectique, c'est pas ça, tout juste est expliquée une base logique commune à beaucoup de pensées... La dialectique, c'est l'observation à posteriori d'un processus de progrès à travers la dynamique énoncée telle quelle :
- thèse
- anti-thèse qui en est sous-jacente
- synthèse qui n'est pas un compromis mais la résultante de la confrontation.
Bref, un état puis une négation, puis la négation de la négation... et ainsi de suite.

Ainsi, la dialectique de l'histoire est facilement repérable, à travers les oppositions de classe et la négation de la négation qui en résulte à chaque fois.
Vas parler comme ça à kekun qu'à jamais fait de politik , il y comprendras quedalle ... Déjà que moi je trouve ça cryptik votre langage ...
youri
 
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Message par boispikeur » 07 Août 2004, 15:59

Youri! L'orthographe bordel!
boispikeur
 
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