"Ils étaient vingt et trois quand les fusilles fleurirent"
Voici maintenant soixante ans, vingt-deux résistants étrangers du
détachement antifasciste "Stalingrad", membres du réseau de Missak
Manouchian, lui-même rescapé du génocide des Arméniens par le régime
turc en 1915, étaient fusillés par l'armée allemande le 21 février 1944,
au Mont-Valérien. Après leur exécution, les dépouilles des vingt-deux
partisans seront chargées sur un camion et jetées dans une fosse commune
du cimetière parisien d'Ivry. Le 10 mai de la même année, Olga Bancic,
une jeune femme, agent du réseau, mère d'une petite fille de trois ans,
et responsable des armes et des munitions, allait, pour le jour
anniversaire de ses trente-deux ans, être décapitée à la hache, à
Stuttgart par la Gestapo.
Arrêtés par les Brigades spéciales des renseignements généraux de la
police française de Vichy aux ordres des nazis, ces Francs tireurs et
partisans de la main-d'œuvre immigrée (FTP-MOI), tous communistes et
juifs pour douze d'entre eux, étaient arméniens, polonais, hongrois,
roumains, italiens, espagnols et davantage encore, nos camarades, nos
frères et sœur d'arme. La guerre populaire des FTP-MOI contre l'occupant
nazi et le gouvernement de Vichy se fera par une série d'attaques et
d'actes de guérilla urbaine d'une audace inouïe à Paris, Belleville,
Montrouge, Clichy, Saint-Ouen, Issy-les-Moulineaux, Levallois. Leur
sacrifice pour que triomphe le communisme, la liberté, la justice,
l'égalité et la paix, doit nous rester en mémoire, jeunes et moins
jeunes, comme une page héroïque de la résistance immigrée antifasciste
: celle des partisans de "l'Affiche rouge" ! Louis Aragon a écrit en
1955, dans "Le Roman inachevé", un poème magnifique intitulé "strophes
pour se souvenir" sur cet épisode glorieux et tragique de la résistance
prolétarienne immigrée, chanté avec beaucoup d'émotion par Léo Ferré.
Soixante ans après la victoire sur le fascisme, le ventre est encore
fécond, d'où a surgi la bête immonde*. Les partis du racisme, de la
xénophobie, de l'antisémitisme et de l'intégrisme religieux relèvent la
tête, en France, en Europe et dans le monde. Les thèses et les
programmes pour lesquelles l'extrême droite, confessionnelle ou non,
combat aujourd'hui, sont directement issues de cette idéologie, primaire
et barbare, qui se nourrie du désespoir populaire en but à la férocité
du système capitaliste. Pour faire reculer cette nouvelle "peste brune"
ennemi de la classe ouvrière par la mémoire et mener avec vous une lutte
résolue contre l'extrême droite, nous vous invitons à vous associer par
la pensée ou à vous joindre à l'hommage public qui sera rendu aux
vingt-trois partisans de "l'Affiche rouge", le dimanche 22 février au
cimetière parisien d'Ivry à 11 heures.
Contre les fascismes, passé et présent, un rassemblement populaire aura
lieu avant cette célébration du souvenir à 10 H 45 au métro
Porte-de-Choisy.
François Perceval
Le 10 février 2004
* Extrait de l'œuvre de Bertolt Brecht, dans "la résistible ascension
d'Aturo Ui"., membres du réseau de Missak