Le mouvement anti-Devaquet hiver 86

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par Jacquemart » 21 Nov 2006, 11:26

a écrit :J'en connais même un qui a réussi l'exploit d'être dans la seule fac parisienne qui soit restée en dehors du mouvement hinhin.gif

Je me demande bien de qui tu veux parler. Pour ma part, j'étais dans un lieu où nous réussimes, par beau temps et vent arrière, à réunir jusqu'à 300 étudiants en cortège sous les insultes des autres qui, parfois des sanglots dans la voix, voulaient nous interdire d'aller promener dans les rues une banderole qui allait "ruiner l'image de la fac auprès des entreprises".

J'en profite pour raconter que dans cette même fac, la première réunion qui eut lieu avait été organisée par une prof, sans doute du PS. Le ton de son topo était tout à fait... universitaire : infiniment modéré, d'une politesse exquise, et pour tout dire chiant à mourir. Cela n'avait pas empêché des dizaines d'étudiants de droite, en costard cravate, de s'amasser dans l'amphi et de l'empêcher de parler en vociférant en jet continu des choses aussi délicates que "Sale rouge !" "A poil !" "Retourne à Moscou !", j'en passe et des plus sexistes.

C'est sans doute une des scènes les plus édifiantes auxquelles j'ai assisté : voir une troupe de petits-bourgeois friqués, cultivés et policés, faisant quotidiennement assaut de hauts principes démocratiques, se changer en meute hurlante prête à mordre lorsque leurs intérêts de classe étaient (un tout petit peu) écornés.
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Message par Sterd » 21 Nov 2006, 11:58

part faure :

A partir du 27 donc, le mouvement prend vraiment de l'ampleur. Et ceux qui lui font prendre cette ampleur sont avant tout les lycéens. Avec les copains on essaye au maximum de sortir des facs et de maintenir une agitation externe à la fac. Tous les jours ils y a des manifs plus ou moins spontanées, à 500 ou à 1000 un peu partout. L'agitation devient perpétuelle. Avec les copains de LO on passe pas mal de temps à aller devant les lycées pour les faire sortir.
Je me souviens d'un jour, ou on se retrouve a deux, les mains dans les poches devant un des lycées du quartier latin, on prend la parole et on se retrouve au milieu d'une centaine de lycéens hilares qui se mettent à hurler des slogans. On arrive a les décider à aller devant un autre lycée ou la même scène se répète, et ainsi de suite devant deux ou trois autres lycées. Au bout d'un moment on se retrouve vaguement à la tête d'un quasi milliers de jeunes qui entreprend d'une façon plutôt pas organisée de remonter le boulevard Saint germain à contre sens, arrêtant la circulation et mettant un bazar pas possible. Au carrefour du Bac, tout le monde s'assoit et attend. Les flics totalement estomaqués et au bord de la panique, s'avisent que le copain et moi comme on a l'air d'être les plus vieux on doit être les chefs sortent un mégaphone de leur voiture et courrent nous l'apporter de manière à ce qu'on mette un peu d'ordre dans tout ça. J'ai du rester la bouche ouverte pendant une bonne minute. Le copain a dit alors "merci monsieur l'agent, on commençait à n'avoir plus de voix". je prends alors le haut parleur, le copain lui, prend le micro et hurle "A l'assemblée !" avec un mégaphone marqué "Police Nationale - CRS" c'était à mourir de rire. Tout le monde se lève et se remet à reprendre le boulevard Saint Germain en direction de l'assemblée nationale. Les flics prennent alors le parti de nous ouvrir la route, c'est comme ça qu'on arrive a l'assemblée précédés par des motards et des voitures de flics qui nous ouvrent la route pour hurler des slogans demandant la démission du gouvernement. Un bon souvenir. Le plus drôle c'est quand les flics sont venus nous reprendre le mégaphone en nous demandant si on en avait encore besoin.
C'est aussi cette semaine là qu'on commencé les pseudos occupations de facs. Je dis pseudos parce qu'a chaque fois on était pas plus de deux ou trois cent. Et parce que les cours continiuaient à se tenir. Ca permettait surtout aux plus mobilisés d'être sur place et de ne pas se crever dans les transports. Mais j'en veux encore aux deux débiles :altharion: qui ne m'ont pas reveillé un matin, et on trouvé très drole de me laisser dormir dans mon sac de couchage alors qu'un TD de physique ou de chimie démarrait. Tout ça va nous mener à la manif monstre du 4 décembre.
Sterd
 
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Message par NazimH » 21 Nov 2006, 12:54

Bon je me permets de rajouter un message -ce que je ne fais pas souvent- mais sans cela on risque de croire que ce mouvement contre Devaquet (enfin sa réforme) était marqué par les aventures des déjà très vieux étudiants qu'étaient alors S. et J.
Or dans ce mouvement ce qui a surpris et marqué c'est l'irruption et le dynamisme des lycéens - j'étais lycéen et jeune à l'époque (un peu comme aujourd'hui d'ailleurs :D )
Ce qui m'a marqué, c'est qu'après le départ du mouvement le vendredi 21 (date incertaine) et des réunions dans le weekend la grève a démarré très vite dans les lycées parisiens puis de banlieue.
Pour ma part on s'est mis en grève le mardi. J'étais dans un lycée où il y avait un grand nombre de jeunes adhérents aux JC (au moins 25, voire plus), dont un ténor national de la JC.
le mardi matin ils ont fait une diff de tract pour appeler au mouvement. Puis le gars responsable de la JC est parti chez lui - ou ailleurs je ne sais- il était en grève, les autres n'avaient qu'à faire comme lui !
Ce qui fait que après quand le lycée s'est mis en grève dans la journée ça lui est passé sous le nez. Ce qui était remarquable c'est qu'après avoir passé la matinée à faire de l'agitation avec des jeunes de de la JC, deux ou trois lycéens qui s'y étaient mis, moi et un copain de LO venu d'une fac (qui s'est présenté comme étudiant venant aider à l'extension du mouvement; moi je le connaissais pas avant mais je l'ai repéré de suite vu que moi aussi j'étais à LO; je ne crois pas qu'il se soit présenté LO en dehors de discussion individuelle) on s'est retrouvé avec une énorme AG le midi. Personne n'y croyait, moi le premier : il y avait 1700 élèves dans le lycée et à cette première AG on s'est bien retrouvé de suite à 600 ou 700.
Ce qui m'a fait flipper à mort, je me souviens c'est que personne ne voulait prendre la parole, même moi le courageux bolchevik ! Le copain étudiant je crois qu'il n'osait pas sans doute parce qu'il n'était pas lycéen prendre les choses en main. Bref je me souviens très bien des 5 bonnes minutes de flottement.
par miracle un groupe d'étudiant gréviste (de Paris 3 censier qui se trouvait pas loin, peut-être 500 mètres) a eu la bonne idée de passer par là à ce moment (ils avaient décidé aussi d'étendre le mouvement) et donc c'est un gars de l'unefid (c'est ce qu'il m'a dit) qui a en fait lancé l'Ag, expliqué la réforme . Puis je me rappelle très bien qu'il s'est retourné vers moi et qu'il m'a dit "bon ben à toi ...." Là j'ai vomi mon petit déj de peur mais j'ai pensé aux copains (comment j'allais leur dire ben j'ai pas osé ! ) et puis j'ai sorti trois phrases pas bien malignes mais très radicales ... qui ont déchainé un tonnerre d'applaudissements. (le gars de l'unefid a du se dire qu'il ne s'était pas adressé au bon lycéen mais bon il avait d'autres chats à fouetter et ils sont repartis).
Et puis après on a fait un beau soviet (dans ma tête de l'époque c'était pas loin d'être cela) bon en fait on a fait un comité de grève- la grève a été voté à une énorme majorité- dans lequel il y avait les adhérents des JC, des lycéens de gauche mais pas organisés et moi (de LO).
par un fait que je ne m'explique pas le militant des JCR du lycée n'y était pas(ne s'y est pas présenté car tout le monde était élu). En fait je n'ai pas de souvenir de son intervention sauf à la fin du mouvement. Je ne dis pas ça pour critiquer simplement pour dire que l'aspect concurrence entre militants était pas forcément très fort entre tous pour tout ; je suppose qu'il a du faire le mouvement avec les gens qu'il connaissait le mieux et ne pas se mêler du "comité de grève" qui est peut-être apparu comme le truc de Lo.
Comme nous étions jeunes et fous très vite on a eu qu'une idée, c'était d'aller courir partout dans les rues pour dire qu'on était pas content. La règle pour les lycéens mobilisés à Paris, c'est devenu une manif par jour -et souvent assez grosse hein 5000 ou 10000 c'est pas exagéré.
Les revendications bon ben c'était pas trop fouillé : moi je me rappelle que j'étais "contre la sélection " et puis aussi "contre la droite" et "les charters d'expulsion de Pasqua". mais les projets de réforme et tout ben j'avais pas trop lu (et pourtant c'était quand même moi qu'avait le plus lu dans le lycée sur le sujet !)
Je me rappelle bien que j'étais tout content que les jeunes "pas politiques" de mon lycée (enfin pas dans une organisation) acceptent de reprendre les slogans généraux contre le gouvernement de droite et contre Pasqua. Pour moi c'était un grand progrès parce que je trouvais que bon Devaquet c'était bien mais qu'il fallait parler de politique. Tout cela pour dire que j'avais ma part d'illusions gauchistes (ou d'enthousiasme de la jeunesse, prenez la version que vous voudrez)
Sinon donc au lycée, dans le comité de grève, il n'y avait que moi de vraiment "politique". Les adhérents de la JC étaient très sympas et on voyait bien que justement ils ne suivaient pas particulièrement la "politique" de la JC mais c'étaient juste des jeunes de gauche.
Le gars de l'appareil de la JC lui c'était autre chose. Le lendemain du départ de la grève (le mercredi matin), je me rappelle qu'il a tenté de refaire son retard de la veille. Il y avait une très grosse AG -sans doute la plus grosse de tout le mouvement
on était peut-être 1000- et le "comité de grève" était en train de se concerter pour savoir comment on allait l'organiser quand tout à coup un gars débarque et dit "ben vous venez ça a commencé !"
Le JC lui il avait pas froid aux yeux il avait commencé tout seul en expliquant comment il fallait faire grève qu'il le faisait depuis hier matin, etc...
Je me rappelle pas de tout mais qu'il s'est débrouillé pour finir sur une invitation à une action qui était une de celle que commençaient à organiser la JC.
-la JC influençait le mouvement dans certains lycées de banlieues et pendant le mouvement son idée sera de ne pas trop se mélanger avec les autres.
En tout cas ça me plaisait évidemment guère mais le problème -et c'est un problème qui sera récurrent et qui existe dans tous ces mouvements lycéens ou étudiants-
c'est qu'en fait il n'y a pas dans le fond de désaccord politique entre les militants qui proposent des actions différentes. Le plus souvent les actions différentes sont surtout le fait de rivalités de boutique -même si certaines sont peut-être plus efficaces que d'autres. Donc je ne savais pas trop comment dire pourquoi je n'étais pas d'accord avec la proposition du JC.
:-P Finalement cà s'est réglé de manière fort démocratique. J'ai fait celui qu'avait pas entendu et à la fin j'ai proposé LA bonne manif ; et comme ses copains étaient avec moi au comité de grève il l'a eu dans l'os. C'est bon d'être un bureaucrate en herbe parfois ! (je parle de moi bien sûr )
Bon je suis déjà très long, je reposterai si ça intéresse certains
NazimH
 
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Message par ianovka » 21 Nov 2006, 13:13

(NazimH @ mardi 21 novembre 2006 à 12:54 a écrit : Bon je suis déjà très long, je reposterai si ça intéresse certains
Bien sûr que ça intéresse du monde ! :smile:

La suite ! La suite !
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Message par Wapi » 21 Nov 2006, 13:20

a écrit :Les revendications bon ben c'était pas trop fouillé : moi je me rappelle que j'étais "contre la sélection " et puis aussi "contre la droite" et "les charters d'expulsion de Pasqua".


J'étais lycéen aussi, je me souviens qu'on avait du mal à bien comprendre les détails de la loi Devaquet, mais être "contre la selection" nous suffisait. En revanche, ce qui était plus clair, c'était contre les expulsions massives de travailleurs immigrés que Pasqua avait inaugurée en affrètant un avion avec 101 maliens pour Bamako ....

Un des slogans les plus repris (enfin dans mon coin) , c'était "Pasqua, Monory, un charter pour le Mali" ...
Wapi
 
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Message par NazimH » 21 Nov 2006, 13:46

tous les détails, les scoops et les infos exclusives sur la "coordination lycéenne" de 1986 à Paris, enfin tels que je les ai perçu, dans un prochain post - mais comme c'est un peu long pas tout de suite....
A part cela faut pas médire, j'ai bien vu Jaquemart portant les deux piquets de sa banderole en 1986... il était donc bien en grève :bleh:
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Message par NazimH » 21 Nov 2006, 16:05

la maladie a parfois du bon j'ai le temps pour les souvenirs
Bon ben je rajoute quelques éléments.
Donc dans mon lycée -à Paris- la grève a duré du mardi 25 novembre au 10 décembre.
Evidemment pas avec la même participation tout le temps. On a pas occupé le lycée, ni bloqué ; ça ne se faisait pas. Au début pendant je pense 3 jours (jusqu'à la première manif du 27/11) c'était très massif ; il devait y avoir 1000 grèvistes sur 1700 élèves, je dis cela c'est bien sûr dur à estimer car il y avait des cours supprimés, des gens qui séchaient etc... Mais cela donne une bonne idée du caractère du mouvement : très massif très vite.
Après, c'est redescendu on devait être 200 en grève (mieux vaut dire actif il y avait plus de gens qui n'allaient pas en cours) la plupart du temps. Plus certains jours dans les manifs, ça variait. Et beaucoup plus le jeudi 4 décembre -par contre très peu la dernière grande manifestation (celle décrétée silencieuse par le milieu social-démocrate).
Car comme cela a été dit le mouvement fut ponctué par trois grandes manifestations jeudi 27 novembre, jeudi 4 et mercredi 10 (si je me trompe faut me le dire).
Donc que faisaient les grévistes qui étaient quand même un bon nombre rien que sur le lycée.
Et bien -rien n'a changé- pas tous la même chose. En fait ce que je me rappelle c'est que les lycéens chez moi se divisaient en groupes suivant des affinités ; qui recoupaient, mais il fallait vraiment connaitre pour s'en apercevoir, des différences “politiques”.
Un groupe était celui qu'avait reconstitué le ténor de la JC qui avait repris en main certains de ses potes (mais pas tous) et qui allait aux actions de la JC.
Il y avait un autre groupe qui suivait souvent les propositions du “comité de grève” mais partait parfois à des RV que j'identifiais mal. Ce groupe est en fait animé par deux gars de SOS Racisme, pas très militants, mais qui se manifesteront à la fin en se disant choqués qu'on ne veuille pas respecter le deuil après la mort d'un manifestant (tué par la police) . A part cela jamais un mot ouvert contre le comité de grève, juste du trainage de pieds.
Le militant des JCR lui aussi avait une bande de copains mais je crois qu'un de ses problèmes, c'est que ses potes n'étaient pas à fond en grève et il devait passer pas mal de temps à les convaincre.
Il y avait aussi une bonne partie des gens qui passaient leur temps à ne rien faire ...ou à draguer. Ce qui est très mal alors que la lutte n'attend pas mais que je trouvais très bien alors – vu que moi aussi je cherchais une copine et d'ailleurs ...bon le reste me regarde moi.
Et puis il y avait aussi la bande “comité de grève” , quand même la plus importante :boxing: . Je l'ai dit dedans il n'y avait aucune rivalité politique car de politique y'avait que moi -et encore !
Alors ce qu'on proposait aux gens de faire, ça variait suivant les jours mais en gros le programme c'était :
Ag le matin
manif l'après-midi avec les autres lycées (et les étudiants pas vieillis avant l'âge)
Le matin, cela variait. Les premiers jours on a beaucoup circulé dans les divers lycées parisiens qui étaient pas autant mobilisés pour pousser au mouvement. On a aussi été trainé nos guêtres dans des LP qui avaient du mal à se mobiliser. Je me rappelle une bonne bousculade avec le directeur d'un LP qui ne voulait pas qu'on rentre.
Ce qui était remarquable, c'était que ceux qui participaient aux actions ne discutaient jamais de leur bien-fondé et surtout qu'ils se fichaient éperdument de savoir qui les proposaient, dans quelle intention, etc...
En gros, cela leur “bottait” ou pas.
Le comité de grève se ralliait aux rendez-vous de la “coordination lycéenne” mais parce que c'était là où il semblait y avoir du monde. Pas parce qu'il était particulièrement d'accord avec ce qu'elle proposait...
Car il faut bien en parler en 86 il y a eu une “coordination lycéenne” à Paris. Constituée dans un joyeux désordre dans un amphi de la fac de Jussieu.
La première chose qu'on peut dire, c'est que dans mon lycée, elle n'a jamais intéressée personne à part moi (et un autre lycéen qui est rentré à Lo 3 mois plus tard). Je crois que deux fois une autre personne est venue avec nous; on était bien content mais lui ça l'a gonflé. Enfin il est pas revenu.Ce qu'en disait les autres du comité de grève, c'est “oui, vas-y donc, tu nous raconteras”. Donc j'étais “délégué” mais cela ne voulait vraiment pas dire grand chose Et en AG à part dire “quelqu'un veut y aller? Personne ? Bon ben moi alors” je crois que ça n'a jamais été différent. Une fois le gars de la JC a commencé à dire que la “coordination” n'était pas bien et démocratique, il s'est arrêté au bout de 2 minutes, ça embêtait tout le monde et en plus personne ne comprenait.
l'essentiel est là : les affrontements qui semblaient si décisifs à la coordination, c'était des tempêtes dans un verre d'eau, parce que cette coordination lycéenne ne dirigeait pas grand chose. Au mieux elle donnait des rendez-vous.
Ça ne veut pas dire qu'elle n'avait aucune importance par exemple pour les militants du PS. Et c'est bien sûr mille fois plus vrai pour la coordination étudiante. En être les porte-parole leur facilitait les choses. Mais bon ils pouvaient s'en passer car leur influence passait par d'autres canaux et surtout dans le fait que l'énorme majorité des jeunes se sentaient PS sans y voir malice. Et c'est ce qui fait qu'une Isabelle Thomas débarquée à la coordination étudiante était quand même réintégrée à la délégation étudiante reçue par le ministre.
Pour en revenir à la coordination lycéenne à Paris, il faut bien la dire la surprise ce fut le nombre de copains de Lo lycéens qu'on vit y débarquer. Cela a surpris tous les autres “appareils” et moi aussi -et je crois que j'ai pas été le seul copain dans ce cas.
En fait on était plus nombreux que les autres et même presque tous les autres réunis. Je dis cela parce que assez vite cela a un peu irrité les autres militants.
La JC leur réaction a été de s'abstenir de venir.
La JCR je ne sais pas trop parce que moi j'ai vu très peu de leur militants à l'époque dans les lycées.
Ceux que cela a le plus énervé ce sont les militants socialistes qui agissaient au travers de SOS Racisme. Il y a eu beaucoup d'épisodes cocasses qui traduisaient cet énervement.
Je me rappelle par exemple d'une coordination à la fac du Panthéon à la fin d'une manif. Quand j'arrive à la fac, j'étais seul avec mon pote (celui qui allait entrer après à Lo), on faisait je crois vraiment jeunes et naïfs et donc à l'entrée alors qu'on cherche la salle un gars à la mine patibulaire (c'est ce que j'ai pensé à l'époque, il avait pas une bonne tête) me dit en regardant a droite et à gauche : “la coordination si vous êtes délégués c'est en haut”; bon on arrive à la salle et là il y avait un gros SO à l'entrée qui filtrait. N'était admis que les “vrais délégués”, ceux que SOS Racisme approuvait. Au bout de 3 minutes je m'aperçois que cela ne va pas car je ne reconnais personne. Je ressors et je retrouve la salle de la VRAIE coordination (la bolchévik :bleh: ) en bas.
Le plus drôle est que au bout d'une demi-heure arrive une délégation de la salle du haut qui veut bien se “réunifier” (n'ayons pas peur des grands mots nous sommes dans la section Histoire) avec la salle du bas. Finalement Vive l'Unité. Il faut dire qu'il y a 60 personnes en haut et 300 en bas. Alors ça fait réfléchir. Voila c'était un tout petit exemple des joyeuses manœuvres des apprentis socialistes. Et tout cela pour un truc qui n'avait quand même pas grande importance.
Autre anecdote – la dernière après j'arrête, promis : l'élection par la “coordination lycéenne” de la délégation qui avait le droit de rencontrer Monory (ministre de l'Education) et Devaquet le soir du 4 décembre. Je me rappelle très bien que tous les copains on se disait pendant l'élection : “surtout ne votez pas que pour les copains”, “il faut voter pour tous les gens qui sont combatifs, dynamiques.” L'élection se fait, la liste des élus est annoncé mais en fait personne ne voit trop qui est élu à ce moment-là.
En fait c'est après quand on se retrouve dans une salle qu'on s'aperçoit du “désastre”. Sur 20 élus ont été élu 14 copains de Lo (et en fait plus parce qu'il y en a deux qui sont des sympathisants mais on le sait pas) . A vrai dire c'est pas complètement de notre faute; je crois que tous les lycéens “dynamiques et combatifs” de la coordination et bien ils avaient voté en priorité pour les copains parce qu'ils les trouvaient les plus efficaces, les moins pinailleurs, mais bon...
Voila d'autres souvenir plus tard....
NazimH
 
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Message par Sterd » 21 Nov 2006, 16:35

part faïve :

Comme le petit Nazim (qui était petit et qui le resta) l'a indiqué, il se trouve qu'à maints endroits les jeunes "lo" se trouvaient être le groupe politique le plus important. Sans toutefois être hégémoniques, mais assez pour se retrouver dans les comités de grève. C'était du pour une bonne part au collossal boulot lycée fait par les vieux depuis 81 et qui avait porté ses fruits. Pour la plupart on ne se connaissait pas. Il a bien fallu deux trois jours pour qu'on se retrouve. A la fac ou j'étais, il n'y avait à l'époque même pas une vente de journaux alors que je crois qu'on y était presque 40. La plupart d'ailleurs n'étaient même pas syndiqués (j'étais un des rares à avoir ma carte UNEFID, mais j'y mettais pas les pieds). Donc on ne se connaissait pas entre nous, et on c'est tous plus ou moins retrouvé délégués de ceci ou de cela, je dirais d'une façon "naturelle". On avait pas d'objectifs différents de ceux du mouvement et on avait pas de malice. En revanche, des qui ont fait la gueule ce sont les potes à Cambadélis et un peu les JCR (au début) qui pensaient faire comme d'hab et se partager le truc entre frères ennemis. Ils ont franchement eu les jetons de voir 40 bolchéviks de fer sortir de nulle part et prendre le micro. Il a bien fallu deux/trois jours pour rassurer nos camarades du SU. En revanche avec les apprentis-sous-secrétaires-d'état-aux-personnes-agées ça n'a jamais été très cordial.
Mais encore une fois, nos "objectifs" étaient seulement de permettre au mouvement de réussir en privilégiant les modes d'organisation démocratiques, comités de grève et coordination. Bien que comme le dit le petit Nazim le rôle de la coord était assez mineur, toute négociation était interdite, leur seul mandat était "retrait du projet" et d'organiser le trajet des cortèges.
Sterd
 
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Message par Sterd » 21 Nov 2006, 20:51

part sixe

Pendant qu'on fait de l'agitation, que Nazim drague et que Jacquemard se collete à la réaction. Il se passe plusieurs phénomènes étranges, que je n'ai compris que plus tard.
Le 27 il y avait eu quelques petits problèmes de SO. Enfin, comparé aux dernières manifs c'était pas grand chose. Juste une centaine de fachos attaquant la manif avec des cocktails molotov, dont pas un seul n'avait atteint sa cible. Il y avait eu une ou deux facs ayant subi des petits raids de ces charmants jeunes gens dont la mienne (c'était même moi de garde à l'entrée :wacko: ) On avait réussi a se replier sans blessés. La différence avec maintenant, c'est qu'ils n'avaient pas de capuches mais le crane rasé. Donc pour le 4 on était prévenus, il a été décidé de monter un SO. Et là c'est devenu franchement bizarre. A coté du SO du comité de grève des structures parallèles se sont mises en place. Plein de gens se mettait à manifester avec des brassards (au cours des petites manifs quotidiennes) en cherchant sans grand succès a canaliser les lycéens. C'est aussi à partir du 27 qu'on a trouvé dans lycées une structure organisée qui entait de prendre le role de l'UNEFID dans les facs. Cette orga c'était SOS Racisme. Ces gens menaient une forte activité pour canaliser le mouvement lycéen et empêcher les manifs sauvages et les débrayages. Ce sont ces zozos qui proposaient des grèves à la japonaises (on va en cours avec un brassard) et autres trucs pour essayer d'arrêter que les rues soient perpétuellement remplies de banderolles. Avec les copains on se retrouvait pas mal seuls pour aller débrayer les lycées ou distribuer des tracts, le peu de soutien reçu la semaine précédente des autres orgas étudiantes devint nul ou quasiment.

La suite plus tard, si ça interesse toujours.
Sterd
 
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Message par logan » 21 Nov 2006, 21:04

a écrit :La suite plus tard, si ça interesse toujours.



:bounce:
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