(logan @ lundi 23 janvier 2006 à 18:53 a écrit : (yannalan a écrit :Je n'ai jamais dit que c'était simple, mais il y a toujours eu une tendance à prendre les paysans pour des ploucs chez les révolutionnaires des villes. Si la révolution pour un paysan, cest "bosse, après tu paies des impôts et on vient réquisitionner et envoyer ta famille à la guerre", alors que justement il en sort, on peut comprendre son manque d'enthousiasme.
Le problème est vraiment mal posé
D'abord il faut rappeler que le pouvoir soviétique bolchevik a réalisé en 1917-1918 ce dont les SR et les mencheviks ont été incapables :
- La fin de la grande propriété terrienne, féodale et bourgeoise
- La paix
C'est cela qui a rallié l'immense majorité des paysans aux bolcheviks et qui a consolidé définitivement leur pouvoir (et non pas les capitaux américains comme le disait Dolmancé plus haut pour nous faire rire.)
La devise du communisme de guerre de 1918 à 1921 c'est "tout pour le front." :w00t:
Les rouges réquisitionnent ce qui peut l'être dans les campagnes : TOUT ce qui est produit en excédent à la campagne doit être envoyé au front et dans les villes. Dans ces années la Russie doit lutter contre l'armée blanche, mais aussi contre le blocus international et l'agression militaire des britanniques, etatsuniens, tchèques, français, polonais, japonais et j'en passe...
Plusieurs provinces souffrent de la famine en 1920 alors que la production agricole n'a quasiment pas baissé par rapport aux années précédentes. Le paysan garde, cache sa production ou la revend au marché noir! (problème qui reviendra à la fin des années 20).
C'est ce qui pousse les bolcheviks à arreter les réquisitions et à réintroduire le marché : avec la NEP on autorise les paysans à travailler leur lopin de terre et à profiter de la vente "libre" de leur production; et on impose leurs revenus. (Oui yannalan c'est SOIT réquisition SOIT impôt progressif. Si on réquisitionne le surproduit du paysan je sais pas ce qu'il va pouvoir payer comme impot! :hinhin: )
Donc le problème n'est pas que les bolcheviks prenaient les paysans pour des "ploucs", ou autres considérations psychologiques. Mais de la difficulté à faire triompher la lutte de classe du prolétariat dans un pays isolé, arriéré, profondément paysan malgré les ilots industriels, et assailli par les puissances capitalistes voisines.
Un peu de modestie face aux problèmes qu'ont rencontré les bolcheviks dans ces années-là.
Pour ce qui est de la modestie, j'en ai suffisamment et si tu as lu mes msgs en détail, j'en montre plus que certains sur ce sujet.
Pour ce qui est de la paysannerie, si ils ont soutenu la Révolution, c'est à la suite des décrets sur la terre et sur la paix, qui sont venus confirmer une situation déjà existante, à savoir que les conscrits abandonnaient le front pour prendre les terres.
Quand tu produis en agriculture, tu es comme tout le monde, tu attends un revenu en proportion de ton travail. Si on vient te rafler tes "surplus" (parfois calculés assez largement), tu surviens à tes besoins comment ? Tu pourrais imaginer que les ouvriers des villes te procurent des produits manufacturés en échange. Le problème étant que les usines tournaient à faible régime.
De plus, quand tu as déjà été mobilisé pour le Front, tu n'as pas envie d'y retourner trop vite, ce n'est peut-être pas bien, mais c'est compréhensible.
Je ne donne pas des leçons aux bolcheviks, simplement je trouve qu'ils l'ont joué un peu raide sur ce thème-là, comme la révolution française l'avait fait d'ailleurs en son temps.
Mais je le répète pour ceux qui ne lisent que d'un oeil, quand l'histoire te mord la nuque et que tu n'as aucun mode d'emploi, tu fais ce que tu peux et c'est déjà beaucoup.