La Baisse du Taux de Profit

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par Jacquemart » 25 Août 2005, 09:26

Bon, de retour de vacances, je me recolle à cette discussion. Parmi tous les problèmes soulevés par Txi, je relève celui-là :
a écrit :On le sait , le propre du système est l’augmentation permanente de la composition organique du capital : la proportion d’argent consacrée au capital constant (matière première, machine, énergie) etc… augmente relativement au capital variable (argent consacré au fonds de salaires).

Justement non, d'après les travaux de maints économistes, dont Duménil et Lévy, cette augmentation n'est pas permanente. Il y a eu des périodes de hausse de la composition organique du capital, qui ont globalement coïncidé avec les phases de baisse du taux de profit. Mais il y a eu aussi deux grandes périodes de baisse de cette composition organique (même si l'indicateur choisi par D&L n'est pas exactement celui-ci, il s'en rapproche fortement).

La première, aux Etats-Unis, prend place en gros de 1900 à 1950, et c'est celle où les sociétés modernes remplacent la petite entreprise d'antan. Le travail à la chaîne, l'invention des équipes, l'amélioration de la gestion en général, a été pour les capitalistes le moyen de diminuer globalement la somme de capital mise en oeuvre par chaque salarié, donc d'augmenter le taux du profit (et pas seulement de piquer du profit au capitaliste voisin, comme le suggère Tx).

Dans la période récente, on constate également une baisse de la composition organique du capital, due cette fois essentiellement à l'effondrement des prix des équipements en informatique et télécommunications, équipements qui parrallèlement représentent une part croissante des investissements.

Le pendant de tout cela, c'est que la "loi" de la baisse de la composition organique du capital désigne une configuration possible, ou probable, de l'évolution de la technique et des salaires, mais que cette configuratyion n'est pas la seule. Et au moins à deux reprises, on peut donc identifier des périodes de "hausse tendancielle" du taux de profit (avec des caractéristiques différentes pour les deux, mais c'est encore une autre histoire).
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Message par logan » 25 Août 2005, 20:28

(Jacquemart @ jeudi 25 août 2005 à 10:26 a écrit : Le pendant de tout cela, c'est que la "loi" de la baisse de la composition organique du capital désigne une configuration possible, ou probable, de l'évolution de la technique et des salaires, mais que cette configuration n'est pas la seule. Et au moins à deux reprises, on peut donc identifier des périodes de "hausse tendancielle" du taux de profit (avec des caractéristiques différentes pour les deux, mais c'est encore une autre histoire).


Donc Marx s'est trompé?
La baisse tendancielle du taux de profit n'est pas une loi immanente du capitalisme mais "une configuration possible"?

:33:
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Message par Véronique » 26 Août 2005, 06:38

Ma qué Txi yé né comprend plous… :33:

(txi @ mercredi 17 août 2005 à 11:02 a écrit :exemple : prenons le rôle d'un acheteur dans une grande boîte. Sa fonction consiste à négocier au meilleur prix les fournitures de l'entreprise. Les 8% de rabais obtenus sur la facture apparaissent comme un plus pour son entreprise et un moins pour le vendeur. Mais c'est un jeu à somme nulle. La répartition du profit est modifiée au profit de l'acheteur (donc affecte la répartition du profit entre les capitaux individuels ), mais le profit global n'est pas modifié.


Si, il me semble bien que l'accumulation de capital et donc le profit global peuvent fort bien être modifiés. Le rabais de 8% accordé par l'entreprise "A" à l'entreprise "B" n’engendre pas pour cette entreprise "B" une baisse automatique de 8% sur la valeur marchande (le prix de vente public) du produit acquis à l'entreprise "A".

Les 8% en question affectent à la hausse le taux de plus-value pour l'entreprise "B", qui peut fort bien décider dans la foulée (hop !) une augmentation de 5% de la valeur marchande du produit. Il y a donc variation du profit global. De plus cela entraîne une hausse du taux de profit pour l'entreprise "B", tandis que c’est l'inverse qui se produit pour l'entreprise "A" [1].

"Le Capital" --tome III, Section 1-- La transformation de la plus-value en profit et du taux de plus-value en taux de profit

[1] Du coup, le vendeur de l'entreprise "A" se fait lourder =D> .
Véronique
 
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Message par Jacquemart » 26 Août 2005, 08:15

Là, je sens qu'on est bien partis. :-P

Bon, déjà, un détail. La baisse du taux de profit, cela occupe une section de 50 pages dans mon édition du Capital, qui en compte au total plus de 3000. Et cette section se trouve dans le Livre 3, autrement dit elle n'a pas été relue par Marx pour la publication. Cela ne prouve pas que les idées qui s'y trouvent comptent pour rien, mais il faut tout de même être prudent sur la forme définitive qu'aurait donné Marx à ses raisonnements.

Marx expose une loi, et des "contre-tendances" qui la contrecarrent. Il est d'ailleurs bien difficile de savoir sur quoi il s'appuyait pour avoir formulé une telle loi - l'appareillage statistique de l'époque étant rudimentaire. Toujours est-il qu'aujourd'hui, 150 ans après, toutes les études chiffrées sur le taux de profit font effectivement apparaître de longues périodes de baisse tendancielle, et surtout, elles font apparaître que les raisons de cette baisse sont celles qu'avait analysé Marx (à la différence de Smith ou Ricardo, qui pronostiquaient aussi une baisse du taux de profit, mais pour de toutes autres raisons qui se sont avérées fausses).

Mais toutes les études chiffrées (et pas seulement celles de Duménil) font également apparaître des périodes de hausse tendancielle du taux de profit - ne serait-ce que celle qui a commencé il y a maintenant plus de vingt ans. Elles font également apparaître des périodes où la composition du capital n'augmente plus, mais diminue. Ces chiffres existent, qu'on le veuille ou non, et il faut bien les expliquer. De plus, je signale que lorsque Marx explique que la composition du capital doit augmenter avec le temps, il formule une proposition qui est parfaitement indémontrable, ou plus exactement, qui repose sur des postulats implicites (indémontrables). Et on constate que ces postulats se révèlent pertinents pour certaines périodes, mais pas pour d'autres. Autrement dit, on peut dire que pour des périodes entières, les contre-tendances sont plus fortes que la tendance. Et cela, il faut bien l'expliquer.

Ce qui précède ne préjuge absolument pas de la trajectoire historique, à venir, du taux de profit et du capitalisme. On parle là de deux échelles de temps différentes.
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Message par lucky » 01 Sep 2005, 17:22

:vlad: Je vous lis depuis pas mal de temps, et j'avoue que ce sujet et la façon dont vous le traités m'intéresse.Donc bonjour à tous.Je suis très peu doué avec les ordinnateurs(entre autre),ce qui fait que je ne suis meme pas certain que vous allez me lire. Donc, sur la baisse du taux de profit, je pense que tout ce qui est raconté actuellement (y compris le dernier texte du congrès de LO) est faux. Sans rentrer dans les détails (ce soir je n'ai pas le temps), rien ne pourrait actuellement expliquer la crise du capitalisme si le taux de profit remontait. Pourquoi la financiarisation et tout le reste? Je veut bien qu'il ne faillent pas prendre 50 pages de Marx a la lettre, mais à l'idée, c'est mille fois plus puissant et dialectique que les Duménil et consorts. Alors sans faire un débat comme l'OCI sur les forces productives quio ont cessées de croitre, Ce qui était vrai à l'écriture du programme, mais plus après la guerre, je pense que la loi de la baisse tendancielle du taux de profit est une loi fondamentale du capitalisme, ce qui explique sa putréfaction. C'est un peu brut tout ça, mais meme les figures sur le taux de profit chez D et L montre que ce taux ne remonte fortement que après un crach boursier dingue et deux guerres mondiales qui ont détruits en masse le capital constant. :victory:
lucky
 
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Message par Ottokar » 01 Sep 2005, 22:02

bienvenue au club, Lucky, heureux homme (ou femme). Et pour l'informatique, ne t'affole pas, ça va venir, il y aura une hausse tendancielle de ta productivité. Pour le débat en revanche, balancer des affirmations comme cela provoque une baisse tendancielle du taux de profit de la discussion. Je ne demande pas mieux que de te croire, mais il me faut un peu plus d'arguments. Ce sera donc pour demain ou ce week-end, quand tu auras le temps... ce genre de débat n'est pas non plus hyper-urgent !
Ottokar
 
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Message par Jacquemart » 01 Sep 2005, 22:24

Salut Lucky

Pour te répondre en deux mots : tes arguments se contredisent. Soit tu considères que toute mesure du taux de profit est invalide, et que donc le "vrai" taux de profit baisse, conformément aux "prédictions" de Marx et contrairement à ce que disent les chiffres. Auquel cas il faudrait tout de même expliquer pourquoi les chiffres se trompent, et quels serait la bonne méthode pour calculer ce "vrai" taux de profit.
Soit tu penses au contraire que les chiffres traduisent une certaine réalité, et alors se pose le problème de les expliquer (ce que tu fais en disant que la remontée du taux de profit est due aux deux guerres mondiales et à un krach boursier, ce qui pose largement plus de questions que cela n'en règle...)
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