(wolf @ mercredi 24 mars 2004 à 19:00, dans le visage du troskisme a écrit : a écrit :
la volonté du peuple de Kronstadt
Tout est dit. Le "peuple" de Cronstadt. C'est quoi le "peuple" de Cronstadt?
Ce sont les travailleuses et les travailleurs, les matelots et les soldats (donc pas les officiers, etc. qui ne sont que des oppresseurs du peuple), qui ont lutté jusqu'à la mort contre les communistes autoritaires : il a fallu des bataillons entiers pour vider chaque logement des insurgé-e-s, et ceux qui ont facilité l'écrasement de la rébellion de Kronstadt, c'était les communistes qui avaient réussi à s'évader des prisons et non pas le peuple.
(wolf @ mercredi 24 mars 2004 à 19:00, dans le visage du troskisme a écrit :
Sur la lancée, Maël affirme que tout danger était passé au moment de la rebellion de cronstadt. Admettons le le temps de poser une question: si le "danger" n'était pas passé, aurait-il fallu prendre d'assaut ou non (après avoir proposé comme les bolcheviques l'ont fait des solutions négociées) ? Oui ou non?
S'il y avait eu danger, je pense que les matelots et soldats de Kronstadt auraient été les premiers à lutte contre. D'ailleurs, sinon, ils se seraient peut-être rebellés avant, puisqu'il y avait déjà eu auparavant des grèves de la part des ouvriers. Ici le danger pour Kronstadt et pour la Russie tout entière, c'était le joug communiste qui avait pris corps depuis trois ans et qui effacait les trois cent ans de tsarisme (selon les termes employés dans les Izvestia de Kronstadt). Si effectivement il y avait eu danger de la part de la Réaction étrangère et que Kronstadt facilitait la venue de ce danger sur la Russie, alors oui, il aurait fallu prendre l'assaut, et il n'y aurait pas eu un tel tollé au sujet de Kronstadt.
En attendant que je fasse plus détaillé, voici un résumé montrant les mensonges employés par Trotsky (dans son article
Beaucoup de tapage autour de Cronstadt du 15 janvier 1938) que j'avais envoyé à un camarade du forum par courriel (écrit en me fondant sur mes lectures et de mémoire):
Premier mensonge : Trotsky nous dit que le Kronstadt de 1921 était différent du Kronstadt de 1917. Pourtant (de mémoire) selon Israel Getzler, les 3/4 des marins étaient déjà là en 1917 et un peu moins de 94% pour les marins du Petropavlosk et du Sebastopol qui ont déclenché la révolte (on ne pouvait pas remplacer aisément les marins de part la complexité des navires).
Deuxième mensonge : le soviet de Kronstadt ne fut jamais acquis aux bolchéviks qui ont toujours obtenus moins de 50 % des suffrages comme l'a dit Trotsky lui-même ("les bolcheviks constituaient, si je me souviens bien, même durant les journées de l'insurrection d'Octobre, moins de la moitié du soviet"), les Kronstadtiens étant politiquement entre les anarchistes et les socialistes-révolutionnaires (SRs) de gauche. Tant que les bolchéviks se montrèrent en phase avec eux, Kronstadt était avec les bolcheviks. Mais dès lors que les bolcheviks abandonnèrent les mots d'ordre de 1917, Kronstadt devint de plus en plus hostile aux bolcheviks. Les mencheviks y étaient présents, contrairement à ce que dit Trotsky, selon Paul Avrich, mais en faible minorité (5 à 10% de mémoire).
Troisième mensonge (corrolaire au premier) : dire que le Kronstadt de 1919 était déjà "nuisible". Or les marins de Kronstadt furent invités (en 1920 il me semble) pour l'anniversaire de la tombée du gouvernement Kerensky pour en faire une reproduction et furent glorifiés par les bolcheviks.
Quatrième mensonge : dire que Kronstadt possédait d'importantes réserves de nourritures et que les marins refusaient d'en envoyer à Petrograd. Cela se réfute aisément par le fait que poussés par la faim, Kronstadt alla jusqu'à accepter des vivres de la Croix-Rouge (cela se serait fait sous un contrôle strict toutefois afin d'éviter que les Blancs puissent prendre pied à Kronstadt, et selon Avrich, Kronstadt n'eu pas le temps de recevoir aucune aide alimentaire ou médicale). Les autorités elles-mêmes le savaient très bien, employant l'argument pour essayer de faire céder les marins. De plus, les réserves étant aux mains des bolcheviks avant la révolte et non pas aux mains des marins, des soldats et des ouvriers, donc les bolcheviks pouvaient en faire ce qu'ils voulaient (notamment, s'octroyer de larges rations).
Cinquième mensonge : dire que le mouvement impulsé par Makhno n'est qu'un mouvement de bandits, de pillards, de saccageurs et d'exterminateurs. C'est justement le contraire. Makhno a toujours collaboré avec les bolchéviks. C'est ainsi grâce à l'appui de Makhno que les bolchéviks ont pu vaincre l'Armée Blanche. Une fois celle-ci vaincue, les bolchéviks se sont retournées contre le mouvement de Makhno, qui n'allait bien entendu pas se laisser fusiller comme des perdreaux. Auparavant, les bolchéviks avaient déjà commencé à exterminer les anarchistes, ceux-ci étant trop révolutionnaires à leur goût. Ils ont également pillés les paysans, en laissant certains sans quoi resemer pour l'année prochaine voire en prenant dans ce qui leur était nécessaire pour passer l'hiver. Les ouvriers qui voulaient ramener de la nourriture de leurs familles dans les campagnes se faisaient pillés au retour. Il fallait certes bien alimenter les villes, mais ce n'est pas en divisant la ville et la campagne qu'il fallait le faire, surtout dans un pays où les 9/10e de la population était de nature paysanne.
Sixième mensonge : inventer le mot d'ordre « Les soviets sans communistes » alors que les rebelles ne l'ont jamais prononcé, leur mot d'ordre principal étant "Tout le pouvoir aux soviets" (comme en 1917) mais "pas aux partis". Cela est d'autant plus mensonger que, dans la pratique, 1/3 des délégué-e-s nommé-e-s pendant la rébellion en mars 1921 étaient des communistes. De plus les rebelles ne revendiquaient d'existence que pour les partis de gauche.
Septième mensonge : Trotsky dit que "Le soulèvement de Cronstadt n'a pas attiré, mais repoussé les ouvriers de Petrograd. La démarcation s'opéra selon la ligne des classes." Il omet volontairement de dire que c'est par solidarité avec les ouvriers de Petrograd, où les marins avaient envoyé une délégation faire le tour des usines, que les marins se sont révoltés. Il omet aussi de dire que son Parti a écrasé les grèves de Petrograd, que les éléments de l'Armée Rouge qui y étaient sur place ont été éloignés car trop proches des ouvriers et remplacés par des cadets (ou koursantys), que Petrograd fut placée sous la loi martiale, que tout rassemblement y était interdit sous peine de fusillade et qu'un couvre-feu y fut instauré à 21 heures. Les ouvriers trop révolutionnaires furent licenciés, privés de leurs rations, voire enfermés dans les caves de la Tchéka. Dans ces conditions, les ouvriers de Petrograd étaient dans l'incapacité d'agir, ceux-ci n'ayant pas d'armes à leur disposition contrairement aux marins de Kronstadt. La démarcation s'effectua donc selon la ligne des forces.
Huitième mensonge : Dire que "les insurgés n'avaient pas consciemment de programme, et, par la nature même de la petite bourgeoisie, ne pouvaient pas en avoir." Les rebelles avaient un programme en 15 points, dont un seul était en direction de la paysannerie et un seul en leur faveur (quoiqu'il concernait l'ensemble de l'armée). Ils ne réclamaient nullement la liberté du commerce ou des mesures allant plus loin que celles de la NEP qui fut un cadeau pour la bourgeoisie, une alliance du capitalisme d'Etat avec le capitalisme privé. Au contraire, ce qu'ils réclamaient n'avaient rien à voir avec la NEP. Leurs revendications étaient plus politiques (égalisation des rations sauf pour les travaux nuisant à la santé, rétablissement des soviets, etc.) qu'économiques. Trotsky le dit lui-même : "Eux-mêmes ne comprenaient pas clairement que leurs pères et leurs frères avaient, avant tout, besoin de la liberté du commerce." Et comme l'a dit Lénine, au Xe Congrès, ils ne voulaient pas des Gardes Blancs (toutefois, contrairement à ce qu'a dit Lénine, ils voulaient bien les bolchéviks mais sans leur dictature de parti unique menée par quelques hauts dirigeants).
Neuvième mensonge : Dire "Tous les préparatifs nécessaires pour cela [pour le ravitaillement] étaient déjà en cours." Il faut préciser que la Grande-Bretagne, qui négociait un accord commercial avec les bolchéviks, a refusée toute aide, tout comme les Etats-Unis. La France se montra très réticente elle aussi. La Finlande de même qui ne voulait pas briser sa neutralité et qui acceptait juste le transit de médicaments mais pas de nourriture. Les émigrés russes ont galéré comme des malades pour obtenir une aide de la Croix-Rouge. Aucun préparatif n'avait été fait et ils ont été surpris par les évènements. On notera d'ailleurs que si la rébellion avait été planifiée, elle se serait déclenchée après la fonte des glaces lorsque la forteresse était inaccessible de manière terrestre et avec des ravitaillements assurés (un plan avait d'ailleurs été élaboré par les émigrés russes).