baisse du taux de profit

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par Puig Antich » 04 Août 2008, 12:46

Je crois me souvenir - peut-être que je me trompes - que Marx déduit la baisse tendancielle du taux de profit du changement tendanciel dans la composition organique du capital. Condamnés à l'investissement pour tenir leur rang dans la concurrence qu'ils se livrent les uns aux autres, les capitalistes font augmenter la part du capital constant (machines) vis à vis du capital variable (force de travail) au sein des entreprises, ce qui provoque une baisse relative de la plus-value, qui est tiré exclusivement du travail puisqu'il est impossible d'exploiter les machines, payées à leur prix réel. Le capital constant © prend le pas sur le capital variable (v).

Mais, en même temps, cette augmentation de la part des machines est fondée sur le progrès technique, qui produit une augmentation de la productivité du travail, donc du taux d'exploitation et donc de la plus-value tirée individuellement du travailleur - c'est même son fondement et la principale motivation du capitaliste. Ce qui constitue donc une tendance contradictoire avec la tendance à la baisse du taux de profit, non ?

Ayant la flemme de retourner dans l'immédiat aux textes, je vous pose donc la question, chers camarades forumeurs. Comment Marx déduit que la tendance à la baisse de la valeur de la masse des ouvriers vis à vis de la masse des machines ne sera pas compensée par l'augmentation du taux d'exploitation ? Sachant que l'augmentation du nombre d'ouvriers continue par ailleurs, via la reproduction élargie du capital - autre tendance vitale pour le maintien du mode de prod. K. Fait-il entrer en ligne de compte les crises cycliques ? La sous-consommation des masses provoquée par le chômage ?

Désolé si c'est un peu brouillon ou si il y a de grossières erreurs, les lois économiques n'ont jamais été mon fort...

:marx: :lenine: :luxemburg:
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Message par Puig Antich » 04 Août 2008, 12:57

Bon, je continue le monologue :smile: .

Pour poser le problème en formules algébriques : taux de profit = plus value sur capital constant plus capital variable.

Le problème est : quels facteurs permettent d'affirmer que l'augmentation du taux d'exploitation, et donc de la plus value, via l'amélioration du capital constant ne contrebalancerons pas tendanciellement l'augmentation de sa masse et donc de son coût - en particulier dans le cadre de la reproduction élargie du capital, ou accumulation.

Rassurez vous je ne suis pas en pleine dérive kautskiste, je cherche juste à comprendre :smile:
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Message par sylvestre » 04 Août 2008, 17:19

Fondamentalement ton erreur consiste en ceci que tu penses que la productivité accrue fait croître le profit. Or cela est vrai pour le premier capitaliste qui met en oeuvre la nouvelle technique, mais à mesure que celle-ci se généralise, le travail moyen socialement nécessaire à la production de la marchandise donnée diminue, et par conséquent la valeur de cette marchandise.


a écrit :Alors même qu'un procédé nouveau de production est plus productif et qu'il augmente le taux de la plus-value, il ne se trouve aucun capitaliste pour l'appliquer de bon gré s'il diminue le taux du profit. Mais le plus souvent tout nouveau procédé fournit des marchandises moins coûteuses et permet de les vendre au début au-dessus de leur coût de production et parfois au-dessus de leur valeur. Le capitaliste qui l'exploite empoche donc la différence entre le coût de production de ses marchandises et le prix du marché des autres qui sont produites dans des conditions moins avantageuses, et il profite de ce que le temps de travail moyen nécessaire à la production de ces dernières dépasse celui qui est inhérent à l'application du procédé nouveau. Cependant, la concurrence aidant, celui-ci ne tarde pas à être généralisé et alors commence la baisse du taux du profit, qui va se rapprochant du niveau du profit des autres branches, sans que ce mouvement puisse être contrarié par la volonté du capitaliste.


Le capital III, chapitre XV

(que l'on pense par exemple à la chute de prix pour un article comme les lecteurs de DVD, où les progrés de productivité ont été spectaculaires en quelques années, mais sans que la rentabilité moyenne du secteur en ait bénéficié pour autant).

Tout cela peut être par ailleurs compensé au moins partiellement par une augmentation du taux d'exploitation (en faisant travailler les ouvriers plus longtemps pour le même prix par exemple).
sylvestre
 
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Message par Puig Antich » 04 Août 2008, 17:43

Ha oui, j'avais zappé cette loi fondamentale que la valeur d'une marchandise est déterminée par la quantité moyenne de travail nécessaire à sa fabrication. CQFD. C'est donc le fondement de la baisse du taux de profit.

Néanmoins, il y a tout de même une quantité importante de travail qui est incorporé comme travail mort au capital constant qui augmente dans la compositions organiques du capital. Quid ? Faut-il le comptabiliser, comment ?
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Message par Jacquemart » 04 Août 2008, 19:07

a écrit :Comment Marx déduit que la tendance à la baisse de la valeur de la masse des ouvriers vis à vis de la masse des machines ne sera pas compensée par l'augmentation du taux d'exploitation ?

Il ne le déduit pas, il l'affirme.

En fait, la loi de la baise tendancielle du taux de profit est vraie si et seulement si certaines hypothèses sont vérifiées quant à la physionomie du progrès technique. La suite a montré que ces hypothèses étaient parfois (souvent) les bonnes... mais pas toujours. Et par périodes au moins, le capitalisme a été plusieurs fois capable de faire monter durablement le taux de profit. D'ailleurs, pas besoin de chercher bien loin, c'est le cas depuis quasiment trente ans.

Au passage, ces difficultés dans le texte de Marx sur ce point (texte qui n'était qu'une suite de notes considérées par leur auteur comme non encore publiables en l'état), ont suscité une énorme littérature par la suite.
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Message par Jacquemart » 04 Août 2008, 19:11

Et pour en rajouter une couche, on peut même tout à fait imaginer qu'avec le progrès technique, la composition organique elle-même se mette non à monter, mais à baisser. Pensez par exemple à l'instauration du fordisme et du travail à la chaîne. Cela a été pour les capitalistes l'occasion tout à la fois d'accroître considérablement la productivité tout en diminuant la valeur du capital mobilisé par travailleur. En instaurant le travail à la chaîne, les capitalistes ont en quelque sorte gagné par les deux bouts.

En ce qui concerne le travail en équipe, il n'augmente pas en soi la productivité. Mais il est là justement pour abaisser la composition organique (disons, pour faire simple,que la même quantité de capital fixe peut servir à faire marner trois fois plus d'ouvriers).
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Message par Puig Antich » 04 Août 2008, 20:04

a écrit :
Au passage, ces difficultés dans le texte de Marx sur ce point (texte qui n'était qu'une suite de notes considérées par leur auteur comme non encore publiables en l'état), ont suscité une énorme littérature par la suite.


Il s'agit peut être de notes, mais il n'en reste pas moins que cette loi a été considéré et est considéré par le marxisme comme la principale limite du mode de prod. capitaliste, principal vecteur de crise. Donc c'est vraiment important.

Le fordisme est un exemple intéressant pour illustrer les contre-tendances. Mais, même si ce que tu dis est dans une grande mesure juste, on ne peut quand même pas dire que la période qui lui correspond n'a pas vu augmenter la composition organique, si on réfléchit à l'échelle de la production en entier - ou alors il faut des chiffres. La masse des ouvriers a augmenté considérablement, mais la masse de l'outillage également, il faut également songer à l'extraction des matières premières, moyens de transports, etc. Quoi qu'il en soit, la loi de l'augmentation de la composition organique se vérifie dans de vastes proportions pour la période suivante, dans laquelle nous sommes, avec le " toyotisme ".
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Message par canardos » 04 Août 2008, 20:19

en fait le capitalisme limite la baisse tendancielle du taux de profit par deux méthodes.

en augmentant la part des production à faible valeur ajoutée effectuée dans les pays pauvre. D'une part les bas salaires permettent d'augmenter la part de la valeur ajoutée correspondant à la plus-value, d'autre part les memes bas salaires permettent de renoncer à la mécanisation de certains processus, augmentant du meme coup le taux de profit à taux de plus value égal.

c'est le cas par exmple à l'usine Renault de Roumanie qui fabrique la logan. Beaucoup de pieces dont la fabrication était automatisée en france sont faites à la main.

l'autre méthode consiste à miser sur l'innovation technologique et à reduire le cycle du produit.

c'est le cas par exemple pour les microprocesseurs dont le cycle de fabrication dure seulement trois ans en moyenne et dont le cout de recherche et de mise au point est superieur au cout de fabrication.

compte tenu du grand nombres d'ingenieurs et de chercheurs, la part du paiement de la force de travail devient superieur à celle du travail cristallisé sous forme d'équipements et de matieres premeire et ainsi la baisse tendancielle du taux de profit est enrayée.

Ce racourcissement du cycle des produits par la course en avant technologique et marketing n'est pas contradictoire avec la loi de la baisse tendancielle du taux de profit quand la part du travail cristallisé augmente, il est une des manieres dont le capitalisme reconstitue ses profits.
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Message par Jacquemart » 04 Août 2008, 20:20

a écrit :on ne peut quand même pas dire que la période qui lui correspond n'a pas vu augmenter la composition organique,

Si. On l'a vu nettement baisser.

a écrit :si on réfléchit à l'échelle de la production en entier - ou alors il faut des chiffres.

C'est bien de chiffres dont je parle, et pas de raisonnements a priori.

a écrit :La masse des ouvriers a augmenté considérablement, mais la masse de l'outillage également, il faut également songer à l'extraction des matières premières, moyens de transports, etc.

La question n'est pas de savoir si l'outillage a augmenté en masse (d'ailleurs, comment comparer douze robots à un laminoir "en masse" ?) mais de savoir s'il a augmenté en coût par heure de travail vivant qui l'emploie. Or, quand la productivité augmente, la valeur du capital baisse (toutes choses égales par ailleurs).

a écrit :Quoi qu'il en soit, la loi de l'augmentation de la composition organique se vérifie dans de vastes proportions pour la période suivante, dans laquelle nous sommes, avec le " toyotisme ".

Ah ? Tous les chiffres que je connais sont très loin d'indiquer une telle tendance. Peut-être en as-tu d'autres ?
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Message par Puig Antich » 04 Août 2008, 20:37

a écrit :Ah ? Tous les chiffres que je connais sont très loin d'indiquer une telle tendance. Peut-être en as-tu d'autres ?


Peut-être à l'échelle globale as tu raison, mais si on regarde une usine moderne d'aujourd'hui et une usine à l'épôque où les OS était le pôle de référence de la classe ouvrière en France, on voit clairement que la mécanisation a augmenté, réduisant en tendance le rôle des hommes à la simple surveillance et maintenance des robots qui produisent - après bien sûr avoir été produit par des hommes.
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