Rwanda

Marxisme et mouvement ouvrier.

Rwanda

Message par com_71 » 07 Mai 2014, 15:48

Les articles du dernier CO, qui décortiquent les responsabilités de l'impérialisme :
Hutus contre Tutsis, un crime colonial

Lorsque les Blancs sont arrivés au Rwanda-Burundi en 1894, ils ont trouvé une société agricole féodale un peu particulière. La population, sous la tutelle d’un roi, était divisée en une vingtaine de clans à l’intérieur desquels on trouvait aussi bien des Hutus (cultivateurs), des Tutsis (éleveurs de bétail) et des Twas (artisans). Tous ces gens parlaient la même langue, pouvaient se marier entre eux et même changer de «statut» puisque cela revenait simplement à changer de métier (des Hutus devenant Tutsi et réciproquement). La majorité des Tutsis étaient pauvres, mais parmi les nobles et les chefs militaires, on trouvait plus de Tutsis que de Hutus (il était un peu plus facile de devenir riche avec un grand troupeau qu’en cultivant la terre). Pour cette raison, les colons allemands puis belges s’appuyèrent sur une minorité de Tutsis pour bâtir leur administration coloniale. Pour diviser et régner, ils érigèrent les métiers rwandais en «races» distinctes : les clans furent abolis, les Tutsis, censés être plus grands et plus beaux devinrent une soi-disant «race supérieure» et les Hutus, une «race» de serviteurs. Ils imposèrent aux colonisés des papiers d’identités portant la mention «Tutsi» ou «Hutu», mirent en place une politique de discriminations systématiques, et enseignèrent leurs théories racistes dans les écoles tenues par les prêtres blancs. Ainsi, ils fabriquèrent de toutes pièces des «ethnies» qui n’existaient pas auparavant.
En 1959 émergea un mouvement indépendantiste dont les chefs étaient, par la force des choses, majoritairement hutus. Les impérialismes français et belges choisirent alors cyniquement de renverser les rôles : ils organisèrent l’indépendance du pays avec ces nouveaux chefs (de façon à rester les maîtres) et appuyèrent cette fois les Hutus contre les Tutsis. Dans les années 1960, nombre de Tutsis se réfugièrent dans les pays voisins : l’Ouganda et la Tanzanie anglophones. Dès lors, les impérialismes anglais et américain s’appuyèrent sur ces Tutsis anglophones à chaque fois qu’ils voulaient contrecarrer la présence française dans la région. Ainsi, après avoir fabriqué deux nations sur un même territoire – nations qui ne pouvaient construire un prétendu «État national» qu’en chassant l’autre – les grandes puissances ont continué à régler leurs petites querelles en les faisant se battre à leur place. Elles portent la responsabilité non seulement du génocide de 1994, mais aussi des massacres de 1965, 1969, 1972, 1988, 1991 et 1993 au Rwanda même, ou au Burundi voisin.

Kagamé, marionnette d’une querelle entre impérialistes

Paul Kagamé, l’actuel président du Rwanda, a une trajectoire typique de certains enfants de réfugiés tutsis. À l’indépendance, quand il avait 4 ans, sa famille a fui le Rwanda pour l’Ouganda (raison pour laquelle il est anglophone comme beaucoup de Tutsis revenus au pays depuis 1994). En 1979, il rejoint les guérilleros de la NRA (National Resistance Army) soutenue financièrement et militairement par les USA. Après la prise du pouvoir, il devient officier des services de renseignement de l’armée ougandaise. En 1989, il co-fonde le FPR avec comme objectif d’envahir le Rwanda. En juin 1990, il est envoyé à Fort Leavenworth, aux États-Unis, pour subir une préparation au commandement militaire. À son retour, le 1 octobre de la même année, il dirige la première offensive du FPR au Rwanda. Au bout d’un an de combats, il est invité à des négociations par Paris qui soutient le régime rwandais, futur organisateur du génocide. Mais dès sa sortie de l’Élysée, les services secrets français l’arrêtent et l’emprisonnent (brièvement à cause de la pression américaine), dans le but de l’intimider. C’est d’ailleurs un des «négociateurs» français, Paul Dijoud, qui justifiera l’arrestation devant la presse. Le même aurait aussi menacé Kagamé : «Si vous n’arrêtez pas le combat, si vous vous emparez du pays, vous ne retrouverez pas vos frères et vos familles, parce que tous auront été massacrés.». C’était deux ans avant le génocide…

Rwanda : Les larmes des crocodiles impérialistes

À l’occasion du 20 anniversaire du génocide rwandais, les médias ont beaucoup parlé de cette catastrophe : d’avril à juin 1994, 800 000 hommes, femmes et enfants ont été systématiquement massacrés par le régime rwandais «pro-Hutu», en représailles à l’avancée d’une guérilla «pro-Tutsi», le Front Patriotique Rwandais (FPR). Les journalistes ont même eu la minimale décence de parler de la «polémique» sur les éventuelles responsabilités de la France. Mais en réalité, il n’y a aucun doute possible. Oui, l’État français porte une terrible responsabilité dans le génocide rwandais de 1994.
Ce n’est pas seulement que la France a participé avec d’autres grandes puissances à la fausse opposition entre Tutsi et Hutu (voir encadré «Hutus contre Tutsis, un crime colonial»). On sait que l’État français soutenait le régime «pro-Hutu» du Rwanda depuis 1975 en l’aidant à former et à entraîner son armée et en lui livrant des armes, à une époque où déjà, de terribles massacres avaient eu lieu. On sait que les 688 soldats français présents sur place ont fait le coup de feu aux côtés de l’armée rwandaise contre le FPR «pro-Tutsi» en 1990-1991. On sait que la sinistre «barbouze» Paul Barril – exécuteur des basses œuvres en Afrique sous Mitterrand – travaillait, depuis 1989 au moins, à l’organisation des services secrets du régime rwandais qui allaient mettre en œuvre le génocide. On sait que le même Barril a signé un contrat de fournitures d’armes et d’encadrement avec les organisateurs du génocide en mai 1994, un mois après le début des massacres. On sait que l’intervention militaire française – les 3 000 hommes de l’Opération turquoise du 22 juin au 22 août 1994 – a permis aux massacres de continuer dans la zone qu’elle occupait bien plus longtemps qu’ailleurs. On sait que lorsque la «radio des mille collines» dont les émissions servaient à attiser et à organiser les tueries s’est installée dans la «zone turquoise», l’armée française l’a laissée continuer à émettre. On sait que les dignitaires du régime, les organisateurs du génocide, se sont réfugiés dans cette même zone turquoise pour être évacués vers le Zaïre, puis pour certains, vers la France. Les autorités françaises ont agi de cette façon pour une raison simple : la victoire du FPR signifiait que le Rwanda passait de la zone d’influence française en Afrique à la zone d’influence américaine et qu’il risquait d’entrainer à sa suite d’autres pays – comme le très riche Zaïre. Et tant pis si cela impliquait un génocide.
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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com_71
 
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