colère en AL après l'adoption de la "directive reto

Dans le monde...

Message par com_71 » 20 Juin 2008, 20:59

(AP 20 6 2008 a écrit :Choc et colère en Amérique latine après l'adoption par l'UE de la "directive retour"

CARACAS - L'Amérique latine, aujourd'hui terre d'émigration après avoir été au cours des siècles un Eldorado pour les migrants venus d'Europe, est furieuse de l'adoption par l'UE de la controversée "directive retour". Jeudi, Hugo Chavez a menacé de ne plus vendre de pétrole aux pays européens durcissant leurs règles sur l'expulsion des immigrés clandestins, emboîtant le pas à ses collègues équatorien et bolivien, premiers à dénoncer cette "directive de la honte".

Au cours d'une intervention télévisée, le président vénézuélien s'en est pris violemment à ce texte, validé mercredi par le Parlement européen, qui harmonise à 18 mois dans toute l'Europe la durée de rétention possible pour les sans-papiers et permet une interdiction de réadmission pour les expulsés allant jusqu'à cinq ans.

Chavez a jugé que la politique approuvée par les parlementaires de l'Union européenne montrait "des signes de fascisme".

"Notre pétrole ne devrait pas aller à ces pays", a ajouté Chavez, affirmant qu'il bloquerait aussi leurs investissements: "si des pays européens commencent à appliquer (cette loi) et à emprisonner des Colombiens, des Paraguayens, des Boliviens, des Equatoriens, nous allons établir notre propre liste de sociétés de ce pays qui ont investi au Venezuela". Quelques compagnies pétrolières européennes comme le français Total sont présentes au Venezuela.

"Nous n'allons emprisonner personne, mais l'entreprise de ce pays devra retirer ses investissements, nous pouvons le faire dès à présent", a mis en garde Chavez.

Un peu plus tôt, à La Paz, Evo Morales réagissait avec force, annonçant qu'il prendrait la tête d'une campagne internationale contre cette directive, en y associant l'Afrique.

"Je demande aux présidents d'Europe, au Parlement européen, qu'ils ne commettent pas cette agression contre l'humanité et la vie. Ce qu'ils font est très grave", a-t-il déclaré en recevant la presse étrangère. "Il y aura une réaction. Je leur demande qu'ils ne nous entraînent pas à un affrontement".

Pour Evo Morales, premier président indien en Bolivie et qui s'est lancé dans un programme de renationalisations, la pauvreté de l'Amérique latine et de l'Afrique sont liées au "pillage" par les multinationales.

L'Equatorien Rafael Correa avait lui été le premier à dégainer après l'adoption mercredi par le parlement de Strasbourg, évoquant une "barbarie" destinée à "criminaliser l'immigration" et "une véritable honte pour cette Europe qui était autrefois une Europe des lumières".

Critiquant la "double morale" d'une mondialisation qui prône la libre circulation des marchandises et capitaux mais "criminalise celle des êtres humains", Correa a dit vouloir lancer un "front commun" afin de "protester contre cette agression et cette atteinte aux droits de l'homme".

A Buenos Aires, le gouvernement argentin a officiellement réaffirmé "qu'immigrer n'est pas un délit", refusant "des concepts tels qu'immigration légale ou illégale" et jugeant "qu'interdire la libre circulation des personnes pour des motifs liés à l'origine, la religion, l'idéologie, le sexe, l'âge ou la qualification est une violation des droits de l'Homme fondamentaux".

Quant au président péruvien Alan Garcia, qui compte un million et demi de ses ressortissants en Europe, il a demandé la convocation d'une réunion spéciale de l'Organisation des Etats américains (OEA) sur ce thème. Selon lui, la mesure affectera plus de trois millions d'immigrés des pays andins (Colombie, Equateur, Pérou, Bolivie).

D'après les chiffres officiels, quelque 500.000 Boliviens vivraient en Europe, dont environ 350.000 en Espagne, la majorité des clandestins: selon l'ambassade de Bolivie à Madrid, seuls 65.000 auraient des papiers de séjour en règle. Pour la Bolivie, pays le plus pauvre d'Amérique du Sud, les "remesas", l'argent envoyé par les migrants, est la troisième source de revenus (10% du PIB). Quant aux Equatoriens, ils sont environ 500.000 rien qu'en Espagne.

A ce jour, l'Europe n'exige pas de visa d'entrée pour les ressortissants d'Argentine, du Brésil, du Chili, du Mexique, d'Uruguay et du Guatemala, à la différence des Colombiens, Paraguayens et Equatoriens, rejoints par les Boliviens.

Sur le terrain, les responsables espagnols cherchaient à calmer le jeu face à la fureur croissante des latino-américains: La nouvelle directive "donne des garanties juridiques à tous les clandestins", là où il n'y en avait pas, a justifié à Bogota le chef de la diplomatie espagnole Miguel Angel Moratinos. A Quito, la secrétaire d'Etat pour l'Amérique latine, Trinidad Jiménez affirmait elle qu'il n'y aurait aucun changement susceptible d'affecter les Equatoriens vivant en Espagne.

Le gouvernement du socialiste José Luis Rodriguez Zapatero s'est engagée à ne pas modifier à la hausse la durée de rétention maximale autorisée en Espagne, aujourd'hui de 40 jours. En revanche, l'Italie de Berlusconi a la politique inverse. AP
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
Avatar de l’utilisateur
com_71
 
Message(s) : 6381
Inscription : 12 Oct 2002, 00:14

Message par ravine chien » 21 Juin 2008, 00:15

Une lettre de Morales écrite avant que ne soit adoptée la directive de la honte
a écrit :Au sujet de la “directive retour”
Jusqu'à la fin de la Seconde guerre mondiale, l'Europe était un continent d'émigrants. Des dizaines de millions d'Europe partirent aux Amériques pour coloniser, échapper aux famines, aux crises financières, aux guerres ou aux totalitarismes européens et à la persécution des minorités ethniques.
Aujourd'hui, je suis avec préoccupation le processus de la dite “directive retour”. Ce texte, validé le 5 juin passé par les ministres de l'Intérieur des 27 pays de l'Union européenne, doit être approuvé le 18 juin par le Parlement européen. Je perçois qu'il durcit de manière drastique les conditions de détention et d'expulsion des migrants sans papier, quelque ait été leur temps de séjour dans les pays européens, leur situation de travail, leurs liens familiaux, leur volonté et le succès de leur intégration.
Les Européens sont arrivés dans les pays d'Amérique latine et d'Amérique du Nord, en masse, sans visa ni conditions imposées par les autorités. Ils furent toujours bienvenus, et le demeurent, dans nos pays du continent américain, qui absorbèrent alors la misère économique européenne et ses crises politiques. Ils vinrent sur notre continent en exploiter les richesses et les transférer en Europe, avec un coût très élevé pour les peuples premiers de l'Amérique. Comme par exemple dans le cas de notre Cerro Rico de Potosi et de ses fabuleuses mines qui donnèrent sa masse monétaire au continent européen entre le XVIème et le XIXème siècle. Les personnes, les biens, les droits des migrants européens
furent toujours respectés.
Aujourd'hui, l'Union européenne est la principale destination des migrants du monde, conséquence de son image positive d'espace de prospérité et de libertés publiques.,L'immense majorité des migrants viennent dans l'Union européenne pour contribuer à cette prospérité, non pour en profiter. Ils occupent les emplois de travaux publics, dans la construction, les services aux personnes et dans les hôpitaux, que ne peuvent ou ne veulent occuper les Européens. Ils contribuent au dynamisme démographique du continent européen, à maintenir la relation entre actifs et inactifs qui rend possible ses généreux systèmes de solidarité sociale et dynamisent le marché interne et la cohésion sociale. Lesmigrants offrent une solution aux problèmes démographiques et financiers de l'UE.
Pour nous, nos émigrants représentent l'aide au développement que les Européens ne nous donnent pas – vu que peu de pays atteignent réellement l'objectif minimum de 0,7% du PIB d'aide au développement. L'Amérique latine a reçu, en 2006, 68 milliards de dollars de transferts financiers de ses émigrés, soit plus que le total des investissements étrangers dans nos pays. Au niveau mondial, ces transferts atteignent 300 milliards de dollars, qui
dépassent les 104 milliards de dollars octroyés au nom de l'aide au développement. Mon propre pays, la Bolivie, a reçu plus de 10% de son PIB en transferts de fond des migrants (1,1 milliards de dollars), soit un tiers de nos exportations annuelles de gaz naturel.
Il apparaît que les flux de migration sont bénéfiques pour les Européens et, de manière marginale, aussi pour nous du Tiers-Monde, vu que nous perdons des millions de personnes de main-d’oeuvre qualifiée en laquelle, d'une manière ou d'une autre, nos États, bien que pauvres, ont investi des ressources humaines et financières.
Il est regrettable que le projet de “directive retour” complique terriblement cette réalité. Si nous concevons que chaque État ou groupe d'États puisse définir ses politiques migratoires en toute souveraineté, nous ne pouvons accepter que les droits fondamentaux des personnes soient déniés à nos compatriotes et à nos frères latino-américains. La directive retour prévoit la possibilité d'un enfermement des migrants sans papier jusqu'à 18 mois avant leur expulsion – ou “éloignement” selon le terme de la directive. 18 mois ! Sans procès ni justice ! Tel qu'il est le projet de directive viole clairement les articles 2, 3, 5, 6, 7, 8 et 9 de la Déclaration universelle des Droits de l'Homme de 1948. Et en particulier l'article
13 qui énonce :
“1. Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l'intérieur d'un Etat.
2. Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son
pays.”
Et, pire que tout, il existe la possibilité d'emprisonner des mères de familles et des mineurs, sans prendre en compte leur situation familiale ou scolaire, dans ces centres de rétention où nous savons que surviennent des dépressions, des grèves de la faim, des suicides.
Comment pouvons-nous accepter sans réagir que soient concentrés dans ces camps nos compatriotes et frères latino-américains sans papier, dont l'immense majorité travaille et s'intègre depuis des années ? De quel côté est aujourd'hui le devoir d'ingérence humanitaire ? Où est la “liberté de circuler”, la protection contre les emprisonnements arbitraires ?
Parallèlement, l'Union européenne tente de convaincre la Communauté Andine des Nations(Bolivie, Colombie, Équateur, Pérou) de signer un “Accord d'association” qui inclue en son troisième pilier un traité de libre-échange, de même nature et contenu que ceux qu'imposent les États-Unis. Nous subissons une intense pression de la Commission européenne pour accepter des conditions de profonde libéralisation pour le commerce, les services financiers, la propriété intellectuelle ou nos services publics. De plus, au nom de la “protection juridique”, on nous reproche notre processus de nationalisation de l'eau, du gaz
et des télécommunications réalisés le Jour des travailleurs. Je demande, dans ce cas : où est la “sécurité juridique” pour nos femmes, adolescents, enfants et travailleurs qui recherchent un horizon meilleur en Europe ?
Promouvoir d'un côté la liberté de circulation des marchandises et des flux financiers, alors qu'en face nous voyons des emprisonnements sans jugement pour nos frères qui ontessayé de circuler librement... Ceci est nier les fondements de la liberté et des droits démocratiques.
Dans ces conditions, si cette “directive retour” devait être approuvée, nous serions dansl'impossibilité éthique d'approfondir les négociations avec l'Union européenne et nous nous réservons le droit d'imposer aux citoyens européens les mêmes obligations de visas quisont nous ont été imposées le 1er avril 2007, selon le principe diplomatique de réciprocité.
Nous ne l'avions pas exercé jusqu'à maintenant, attendant justement des signaux positifsde l'UE.
Le monde, ses continents, ses océans, ses pôles, connaissent d'importantes difficultésglobales : le réchauffement global, la pollution, la disparition lente mais sûre des ressources énergétiques et de la biodiversité alors qu'augmentent la faim et la misère dans tous les pays, fragilisant nos sociétés. Faire des migrants, qu'ils soient sans papier ou non, les boucs émissaires de ces problèmes globaux, n'est en rien une solution. Cela ne correspondà aucune réalité. Les problèmes de cohésion sociale dont souffre l'Europe ne sont pas la faute des migrants, sinon le résultat du modèle de développement imposé par le Nord, qui détruit la planète et démembre les sociétés des hommes.
Au nom du peuple de Bolivie, de tous mes frères du continent et des régions du monde comme le Maghreb et les pays de l'Afrique, je fais appel à la conscience des dirigeants et députés européens, des peuples, citoyens et militants d'Europe, pour que ne soit pas approuvée le texte de la “directive retour”. Telle que nous la connaissons aujourd'hui, c'est une directive de la honte. J'appelle aussi l'Union européenne à élaborer, dans les prochains mois, une politique migratoire respectueuse des droits de l'Homme, qui permette le maintien de cette dynamique profitable pour les deux continents, qui répare une fois pour toutes l'énorme dette historique, économique et écologique que les pays d'Europe ont envers une grande partie du Tiers-Monde, et qui ferme définitivement les veines toujours
ouvertes de l'Amérique latine. Vous ne pouvez pas faillir aujourd'hui dans vos “politiques d'intégration” comme vous avez échoué avec votre supposée “mission civilisatrice” du temps des colonies.
Recevez tous, autorités, eurodéputés, camarades, un fraternel salut depuis la Bolivie. Et en
particulier notre solidarité envers tous les “clandestins”.
Evo Morales Ayma
Président de la République de Bolivie
ravine chien
 
Message(s) : 0
Inscription : 17 Mars 2003, 14:50


Retour vers Actualités internationales

Qui est en ligne ?

Utilisateur(s) parcourant ce forum : conformistepote et 3 invité(s)