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Elections ou fuite en avant, nouveaux scénarios catalans
[AFP] Michaela CANCELA-KIEFFER 19 octobre 2017
Madrid (AFP) - La Catalogne, région espagnole au coeur de l'Europe où les indépendantistes menacent de faire sécession, sera-t-elle entraînée dans une dangereuse spirale d'agitation et de répression ? Ou s'engagera-t-elle dans l'organisation d'élections régionales avec l'espoir de repartir à zéro ?
Voici les différents scénarios envisagés:
- La suspension d'autonomie
Bien que la Catalogne soit profondément divisée sur l'indépendance, les séparatistes au pouvoir envisagent de déclarer l'indépendance sur le fondement du référendum d'autodétermination interdit du 1er octobre. Ils estiment être légitimés par les résultats, invérifiables: 90,18% de "oui" et 43% de participation.
Le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy annonce de son côté qu'il va chercher à reprendre le contrôle de la situation en suspendant tout ou partie de son autonomie, une mesure sans précédent depuis la dictature de Francisco Franco (1939-1975).
Ces mesures pourraient commencer à être mises en oeuvre vers la fin octobre, après leur adoption au Sénat.
Madrid a déjà mis sous tutelle les finances de la Catalogne, qui sera à court de fonds propres d'ici quelques semaines.
Le gouvernement pourrait aussi prendre le contrôle de sa police et remplacer ses dirigeants. Il cherchera à présenter la mesure comme le moyen de restaurer la "démocratie", promettant à terme l'organisation d'élections régionales.
De son côté le gouvernement catalan se lancerait alors dans une déclaration unilatérale en bonne et due forme. Mais reconnue par qui ? Pour l'instant il n'a aucun soutien de poids dans la communauté internationale. Ses dirigeants pourraient être incarcérés, au risque d'en faire des martyrs pour leur sympathisants.
- Elections
Mercredi des sources gouvernementales à Madrid ont assuré que la convocation d'élections régionales par Carles Puigdemont amènerait le gouvernement à renoncer à une suspension d'autonomie.
Carles Puigdemont est dos au mur: au sein de la coalition hétéroclite qui l'a hissé au pouvoir (qui rassemble des conservateurs, la gauche républicaine et l'extrême gauche), certains souhaiteraient qu'il fasse marche arrière, d'autres qu'il avance.
Des élections lui permettraient de reculer sans être "humilié". Les Catalans pourraient alors exprimer leur point de vue. L'occasion pour Madrid de faire campagne aussi.
Mais, "si on l'emporte ne serait-ce qu'avec une voix au-delà des 50% on s'en va", déclarait un responsable indépendantiste à l'AFP mercredi.
Pour l'instant l'option est écartée dans leur camp. Mais de longues journées vont encore s'écouler avant que le Sénat ne vote sur la suspension d'autonomie et la donne pourrait encore changer.
- La rue, le facteur déterminant
Dans tous les cas de figure 40 à 50% des habitants de la région sont indépendantistes selon les sondages. Beaucoup se sentent "humiliés" par la politique des conservateurs, qui avaient obtenu l'annulation partielle d'un statut accordant de larges compétences à la région en 2010.
L'Espagne a connu au Pays basque, 2,2 millions d'habitants, 40 ans d'agitation sociale autour du combat pour l'indépendance de l'organisation armée ETA.
Maintenant que ce front s'est apaisé, va-t-elle vers une situation encore plus grave en Catalogne, 7,5 millions d'habitants ? Pour l'instant les manifestations restent pacifiques.
Au sein du gouvernement espagnol certains tablent sur la lassitude des Catalans qui vivraient de plein fouet une crise économique induite par l'instabilité politique. Les plus touchés tourneraient alors le dos aux "radicaux".
Mais le gouvernement catalan dispose aussi d'une base large de soutiens.
Lors du référendum, des milliers de personnes ont nargué l'autorité de l'Etat pour cacher les urnes ou résister pacifiquement aux abords des bureaux de vote. Beaucoup ont manifesté "contre les forces d'occupation".
Ces militants restent mobilisés. Ils sont d'horizons très divers, de classes sociales aisées ou non, étudiants, paysans, fonctionnaires, maires, pompiers, dockers, syndicalistes...
Les plus déterminés pourraient chercher à "paralyser la Catalogne" par des blocages d'infrastructures.
L'éventuelle réaction des forces de l'ordre envoyées en renfort par Madrid serait alors déterminante, et, plus sensible encore, celle des policiers de Catalogne, dont beaucoup sont fidèles à leurs dirigeants régionaux.
- La pression extérieure
Mariano Rajoy comme Carles Puigdemont ne pourront ignorer les pressions venues de l'extérieur: responsables européens inquiets, investisseurs, banques, agences de notation.
Une guerre d'image est engagée sur le terrain des droits de l'Homme, alors que les séparatistes jouent la carte de la "démocratie contre la répression de Madrid", qui peine à expliquer que les droits des Catalans non indépendantistes ont aussi été violés, notamment en leur refusant un débat en profondeur sur l'indépendance.
En ce sens, les deux auraient tout à perdre si le blocage persiste.
Si la petite bourgeoisie en arrivait - contre les conseils et la critique des communistes - à démembrer l'Espagne, les résultats négatifs d'un tel régime ne tarderaient pas à se manifester. Les ouvriers et les paysans des différentes parties de la péninsule arriveraient vite à cette conclusion : oui, les communistes avaient raison. Mais cela signifie précisément que nous ne devons pas assumer la moindre parcelle de responsabilité dans le programme de Maurin...
ET MAINTENANT QUOI ?
Après le discours de Puigdemont à la Generalitat, de nombreux indépendantistes sont restés bouche bée, déçus. Le président a déclaré l'indépendance, mais l'a suspendue "pour négocier".
Rajoy a répondu en disant que cela devrait être clarifié. Il a fixé une date limite avant la dissolution de la Generalitat via le bâton ou la soumission. La sortie tôt ou tard se fera par les élections. Rajoy a joué ses cartes contre Puigdemont et a réussi à couvrir sa corruption et sa politique contre la classe ouvrière sous le parapluie de "l'unité de l'Espagne". En outre, avec le soutien de Pedro Sánchez, en échange d'une réforme de la Constitution, cette unité sera entérinée aux futures élections avec une victoire plus que possible de Rajoy si on y remédie pas par des luttes ouvrières. Le jeu s'est bien passé pour la droite.
D'autre part, le "processus" vers la République Catalane est ralenti. La Catalogne n'est pas la Slovénie, ni la Lituanie, c'est-à-dire toutes ces républiques qui sont nées avec l'hécatombe de la disparition de l'URSS. L'UE ne soutient pas la sécession catalane, pas plus que le reste de l'Espagne. La Catalogne est une région riche et capitaliste, ce n'est pas le Sahara espagnol. La droite catalane, comme Rajoy, a joué du processus en cours pour couvrir la honte de leur corruption et détourner la grave crise sociale. L'espagnolisme et le catalanisme sont des nationalismes qui s'alimentent. S'il est vrai que les Catalans ont le droit de décider de leur avenir, la classe ouvrière doit considérer ses propres objectifs, ses propres intérêts.
Une république catalane, entre les mains de la bourgeoisie comme dans le reste de l'Etat, ne sera pas plus qu'une arme entre les mains de la bourgeoisie pour continuer la même chose : l'exploitation capitaliste de la classe ouvrière.
IL EST TEMPS DE RENDRE LES TRAVAILLEURS VISIBLES !
Alors même qu'on sert la soupe du thème de la Catalogne, le conflit social du monde du travail n'apparaît nulle part. La crise économique pour la classe ouvrière loin de s'améliorer devient chronique. La situation sociale montre qu'il y a de plus en plus de travailleurs pauvres. Le salaire le plus fréquent est inférieur à 1000 €. Les grèves sont de nouveau à l'ordre du jour.
La précarité, les licenciements, sont devenus chroniques depuis une décennie. Maintenant nous sommes avec des emplois et des salaires de misère. La peur d'être licencié augmente parmi les travailleurs.
Dans les entreprises, une politique de licenciement des travailleurs fixes est en cours, afin de banaliser les conditions précaires. La raison donnée, entre autres, est la "compensation" : "Alors que certains peuvent recevoir 20 jours par an, les autres ne reçoivent rien. Tandis que les fixes accumulent des droits et des primes les autres rien de rien."
Les employeurs osent licencier même les délégués syndicaux, qui étaient censés être légalement protégés. La plupart du temps, il n'y a pas de représentation syndicale dans la majorité des petites et moyennes entreprises. Il y a des entreprises qui ont congédié le délégué ou la "liaison" comme on dit et on n'ose pas en choisir un nouveau.
Cependant, si nous étions conscients de notre force, un autre coq chanterait. Nous sommes les travailleurs qui produisent et assurent le fonctionnement de la société. Sans nous, il n'y aurait pas de propreté, d'assainissement, d'éducation, de tourisme, de voitures, de machines, etc. Tout est entre nos mains, sauf la conscience que c'est le monde du travail qui tient la poêle à frire par le manche.
Comprendre que l'unité et la solidarité sont notre force, c'est changer cette situation.
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