Gayraud de Mazars a écrit :Salut camarades,
Merci camarades, pour ce fil très intéressant et animé...
J'ai du mal à classer la Chine comme un Etat bourgeois classique et impérialiste qui aurait rompu totalement avec son passé bureaucratique d'Etat ouvrier déformé ! C'est pas vieux en 1966, le Parti Communiste Chinois au pouvoir en pleine Révolution Culturelle, décréta que tout citoyen devait posséder un exemplaire du « Petit Livre rouge » de Mao comme symbole de sa loyauté envers le Parti, et un projet de traduction et d'impression massive fut mis au point afin que tout partisan ou sympathisant puisse lire le texte dans sa propre langue... En France les Maos récitaient aussi le bréviaire comme en Chine... En Chine, comme en France, et ailleurs, cette génération maoïste a disparu..."
Fraternellement,
GdM
Bonjour, je pense pour une fois comprendre le malentendu entre moi, James et vous: vous semblez constater que la dissolution de l’URSS en 1991 est le cas typique de l’effondrement du «socialisme» (bureaucratique ou révisionniste, là n’est pas le propos), alors qu’en réalité, les autres états bureaucratiques (voire les autres républiques soviétiques non-russes) ont suivi une trajectoire de coups de palais bureaucratiques sans vagues ni bruits, que ce soit en Angola, Albanie ou Burkina-Faso, avec des changements économiques plus ou moins grands.
L’exemple le plus intéressant à étudier est le cas turkmène : ceux qui suivent les blogueurs d’internet connaissent ce pays probablement en tant que «pire dictature du monde». La réalité, c’est que c’est le pays qui a le moins changé de l’ère soviétique, avec un Parti «communiste» unique ayant simplement changé de nom sous la houlette du même dictateur stalinien qu’en 1990 et de ses complices bureaucrates, des kolkhozes et sovkhozes toujours omniprésents dans l’agriculture, une industrie étatisée, une économie planifiée, et un État-Providence fort. L’Asie Centrale ex-soviétique a vu une trajectoire régionale de nations gardant un héritage soviétique (surtout l’Ouzbékistan jusqu’en 2016, ayant maintenu une planification économique). Toute personne honnête intellectuellement admet qu’une restauration capitaliste a malgré tout eu lieu.
Pourtant, la Chine, qui a privatisé à une vitesse spectaculaire ses industries durant les années 90, décollectivisé l’agriculture, a abandonné le monopole d’Etat sur le commerce d’extérieur, n’a pas de planification (je n’ai pas répondu à l’argument de James, car pour moi, cela me semblait être une évidence qu’il n’y a pas de planification dans un état où des monopoles privées dirigent à plus ou moins grande échelle la vie économique d’un pays, même l’URSS sous la NEP ne prétendait pas planifier ce que les koulaks produisaient) garde son titre d’état ouvrier dégénéré.
Et attention : cela n’implique absolument pas que la Chine est un état impérialiste. Je suis capable d’admettre que l’existence d’un Chine de cette nature est un héritage historique de la révolution démocratique-bourgeoise qui doit être défendu par les révolutionnaires face aux rapaces.
Mais la prétendre similaire à l’URSS en tant qu’état ouvrier dégénéré est tout simplement anachronique. Pour citer Trotsky
Celui qui n'accepte la révolution prolétarienne que si elle est accompagnée de toutes les commodités et de garanties à vie ne peut poursuivre notre chemin. Nous acceptons l'État ouvrier tel qu'il est et affirmons : « C'est notre État. » Malgré son héritage de retard, malgré la famine et la paresse, malgré les erreurs bureaucratiques et même les abominations, les travailleurs du monde entier doivent défendre bec et ongles leur future patrie socialiste que cet État représente.
Si James peut regarder la Chine et dire "c’est notre État» alors soit. Mais pas moi.
Post-Scriptum :
Maos récitaient aussi le bréviaire comme en Chine... En Chine, comme en France, et ailleurs, cette génération maoïste a disparu..
Une blague connue en Chine dit :
Wang Hongwen alla trouver le maréchal Zhu De et lui demanda de lui céder le pouvoir. « Tu peux prendre le pouvoir, mais seulement si tu parviens à faire tenir cet œuf debout », dit Zhu en lui tendant un œuf. Après plusieurs jours d'efforts, Wang n'y parvint toujours pas. Il alla donc demander de l'aide à Deng Xiaoping.
« C'est facile », dit Deng, et il écrasa violemment l'œuf sur la table.
« Ah oui, il est cassé ! » s'exclama Wang.
« Le président Mao a dit : rien ne peut subsister sans destruction », a déclaré Deng, « regardez, l'œuf n'est-il pas debout maintenant ? »
Je pense que ça résume assez bien comment les Chinois voient Mao.
Un Mao mangeur de frites d’accord avec LO 9/10. Étudiez, étudiez, étudiez !