Libération des députés kurdes

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Message par alex » 10 Juin 2004, 13:12

La Turquie libère quatre députés kurdes pour s'entrouvrir les portes de l'UE
La cour d'appel de Turquie a ordonné mercredi la libération de quatre députés pro-kurdes • Ankara cherche ainsi à s'attirer les bonnes grâces de l'UE qui doit rendre en octobre un rapport sur la mise en oeuvre de réformes démocratiques •

Par Marc SEMO
mercredi 09 juin 2004 Liberation

C'était l'un des gestes exigé par l'Union européenne. En début d'après-midi mercredi, la cour d'appel d'Ankara a ordonné la libération de Leyla Zana, Hatip Dicle, Selim Sadak et Orhan Dogan, quatre députés du DEP, parti pro-kurde dissous par la Cour Constitutionnelle. En 1994, ils avaient été condamnés à quinze ans de prison, accusés d'entretenir des liens avec les «séparatistes» kurdes du PKK ( Parti des Travailleurs du Kurdistan) d'Abullah Öcalan, lancés depuis 1984 dans une lutte armée contre Ankara. Cette «sale guerre», qui se déroula pour l'essentiel dans le sud-est anatolien peuplé en majorité de Kurdes, a fait plus de 35.000 morts jusqu'à l'arrêt des combats en 1999 après l'arrestation d'Öcalan.
«Diktat» de Bruxelles
«Leur sentence n'a pas été annulée, soulignent les juges turcs. Mais, prenant en compte leur long emprisonnement, la décision a été prise de les libérer en attendant la fin de l'enquête». Aux yeux des Européens, ces députés sont des prisonniers politiques et la Cour européenne de Strasbourg avait appelé Ankara à revoir ce procès jugé «inéquitable» car mené devant une Cour de Sureté de l'Etat où siégeait aussi un juge militaire. Le procès d'appel mené devant une Cour de sureté de l'Etat exclusivement civile depuis les réformes de l'année dernière avait confirmé le verdict précédent.
L'appareil judiciaire ne voulant pas donner l'impression de céder au «diktat de Bruxelles». Mais elles ont attendu quelques semaines, comme le prévoyaient nombre d'observateurs, pour effectuer ce geste. Dans l'après-midi, des centaines de militants et journalistes se sont regroupés devant la prison d'Ulucanlar à Ankara en attendant la libération annoncée de Leyla Zana et de trois autres anciens députés kurdes.
«Comme une usine qui travaille en continu»
Au pouvoir depuis les élections de novembre 2002, les islamistes modérés de l'AKP (parti de la justice et du développement) de Recep Tayyip Erdogan s'engagent à fond dans les réformes exigées par les Européens. La peine de mort a été abolie et la Consitution modifiée. Les cours de sûreté de l'Etat finalement totalement supprimées et les droits culturels des minorités reconnus. Depuis mercredi ont commencé sur la télévision publique des émissions en kourmanji, le principal dialecte kurde, ainsi que dans d'autres langues minoritaires comme l'arabe, le bosniaque ou le circassien.
Les réformes voulues par l'UE sont aussi pour les islamistes un excellement moyen de limiter les pouvoirs de l'armée, gardienne de la laïcité et des valeurs républicaines, qui leur est hostile. Le parlement continuera à siéger jusqu'à la mi-juillet pour adopter les textes des réformes encore en souffrance. «C'est comme une usine travaillant en continu», a déclaré à Reuters Murat Sungar, qui dirige le secrétariat général de la Turquie aux Affaires européennes.
Résistance
A la veille des élections européennes et alors que dans plusieurs pays - dont la France - l'hostilité à une adhésion turque est forte, les autorités d'Ankara comptent bien engranger les résultats politiques de la libération des députés kurdes. «Ceux qui cherchent des prétextes pour refuser à la Turquie l'adhésion à l'UE ont perdu leur dernier atout. Il y a une démocratie qui fonctionne en Turquie, les règles sont observées», a estimé le ministre de la Justice Cemil Cicek cité par l'agence Anatolie.
Mais nombre des réformes adoptées par la Turquie depuis qu'elle a été pleinement reconnue comme pays candidat en 1999 lors du sommet d'Helsinki, restent encore sur le papier. Elles sont freinées par les résistances de l'appareil ou de l'armée. On ne change pas non plus des mentalités par décret.
Ces points noirs ont été soulignés l'automne dernier par la Commission Européenne dans son rapport d'évaluation tout en saluant «les progrés remarquables» accomplis. Prochaine étape, en octobre prochain quand l'UE rendra son rapport sur l'état des réformes démocratiques en Turquie: elle décidera deux mois plus tard d'une date pour l'ouverture des négociations d'adhésion du pays à l'UE.
alex
 
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