Turquie : annulation d'un texte

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Message par com_71 » 05 Juin 2008, 15:59

(afp 05 06 2008 a écrit :Foulard islamique en Turquie: annulation d'un amendement jugé contraire à la laïcité
AFP Par Burak AKINCI

ANKARA (AFP) - La Cour constitutionnelle a annoncé avoir annulé jeudi un amendement du parti islamo-conservateur au pouvoir en Turquie autorisant le port du foulard islamique dans les universités du pays, jugeant qu'il est contraire à la laïcité.


La Cour s'était réunie pour statuer sur l'autorisation du port du voile à l'université, une décision qui pourrait s'avérer cruciale pour le parti islamo-conservateur au pouvoir menacé d'interdiction pour actions contraires à la laïcité.

Les onze juges devaient examiner une requête de l'opposition laïque demandant l'annulation d'une révision de la Constitution adoptée en février à l'Assemblée nationale, autorisant le port du foulard dans les établissements universitaires.

Les délibérations ont débuté à 06h30 GMT mais les juges devaient au préalable se pencher sur cinq autres dossiers qui figuraient à leur agenda avant de passer à la question très controversée du foulard sur les campus, selon les télévisions.

Cette révision contestée de la constitution constitue l'un des principaux arguments d'une procédure séparée en attente devant les mêmes juges, celle demandant l'interdiction du parti de la justice et du développement (AKP, issu de la mouvance islamiste) pour "actions allant à l'encontre de la laïcité" en Turquie, pays musulman mais au régime laïc.

Plusieurs scénarios étaient envisagés: les magistrats pouvaient notamment décider de rejeter le recours de l'opposition en estimant que la légalisation du port du voile ne constitue pas une entorse à la loi fondamentale, ou juger éventuellement que la réforme en l'état n'est pas suffisante pour permettre aux étudiantes voilées d'entrer sur les campus universitaires.

La Cour pouvait aussi juger que la révision porte atteinte aux dispositions non amendables de la loi fondamentale, en l'occurence la laïcité, et décider de l'annuler. Une majorité de sept juges était nécessaire dans un tel cas de figure.

Ce scénario était considéré le plus mauvais pour l'AKP car il pourrait préfigurer une dissolution de cette formation au pouvoir depuis 2002 qui a polarisé la société turque en autorisant le port du voile dans les facultés.

L'AKP s'est défendu en faisant valoir que l'interdiction du voile, imposée après le putsch militaire de 1980, contrevient à la liberté de conscience et au droit à l'éducation.

La Cour s'était déjà prononcée à deux reprises dans le passé contre le port du voile dans les universités.

L'interdiction de se couvrir la tête sur le campus avait aussi été maintenue par le Conseil d'Etat turc et la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH).

Malgré la révision, la plupart des universités ont maintenu l'interdiction, jugeant que le parlement devait adopter une réglementation détaillant le code vestimentaire autorisé et excluant les symboles les plus ostentatoires d'un islam radical, comme le tchador ou la burqa.

La question du voile divise depuis plus de deux décennies la Turquie où il est interdit de le porter à l'école et dans la fonction publique.

Le voile le plus présent en Turquie est le fichu traditionnel noué sous le menton et porté surtout dans les campagnes. Aux yeux de la population, ce voile incarne la Turquie profonde et traditionnelle. Porté par habitude plus que par ostentation, il exprime moins un acte politique qu'un attachement aux coutumes.

Le voile musulman, le hidjab, a une signification et une implication bien différentes, montrant une appartenance à la foi musulmane. Ce voile couvre soigneusement tous les cheveux et encadre l'ensemble de la tête.

Les partisans de la laïcité (l'armée, la magistrature et l'administration des universités) estiment que le port du voile est un défi au régime laïc en vigueur en Turquie.
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Message par com_71 » 05 Juin 2008, 16:05

Qu'avait dit sur ce texte le groupe trotskyste turc "Sınıf Mücadelesi" :

(Sınıf Mücadelesi a écrit :

Pendant que dans tous les pays du monde on discute de la récession économique, le gouvernement AKP donne la priorité au foulard. Certains se demandent pourquoi soudainement le foulard revient au premier plan de l'actualité. Mais il y a cinq mois l'AKP l'avait ouvertement dit dans sa propagande électorale et de plus, alors que les vrais problèmes ne trouvent pas de solution, il y a sans doute besoin d'autres sujets pour occuper l'actualité.

(...) On ne peut cependant réduire le problème du foulard à l'AKP. Tous les partis bourgeois et les dirigeants qui se sont succédé au pouvoir ont nourri la réaction religieuse. De ce point de vue, tous ces partis ont rempli leur mission. À tel point que les concessions faites dans le passé les obligent aujourd'hui à une concession encore plus importante aux milieux religieux réactionnaires.

La réaction religieuse a trouvé le maximum de soutien après le coup d'État militaire du 12 septembre 1980. Les hommes d'État et les généraux, pour faire barrage aux luttes croissantes de la classe ouvrière pour ses droits sociaux et économiques, ont décidé consciemment d'avoir recours à la réaction religieuse. Aux ouvriers qui luttaient pour leurs droits, il a été proposé de faire plutôt des prières pour l'autre monde... Et ainsi la réaction religieuse a été renforcée.

Le dirigeant d'une secte connue, Fethullah Gülen, a pu dire en parlant du général putchiste Evren qu'il a « mérité le paradis », car le coup d'État du 12 septembre a rendu les cours de religion obligatoires dans le primaire et le secondaire.

Aujourd'hui, l'enseignement universitaire devient problématique. Il n'y a pas suffisamment de foyers universitaires, pas d'enseignement de qualité, pas d'enseignants qualifiés, pas assez d'universités ; ceux qui ont terminé leurs études ne trouvent pas de travail et ceux qui trouvent du travail n'ont pas la formation requise... Le gouvernement, qui ne trouve pas de solution aux vrais problèmes, va rajouter dans les universités un problème supplémentaire de réaction et de répression.

Le foulard n'est pas « un droit qui rend les femmes plus libres » ni « un problème de droit humain », contrairement à ce qui est dit par des politiciens sans vergogne. Le foulard est un symbole de la réaction religieuse et de la domination des hommes sur les femmes. Il rend les femmes enore plus esclaves. Les politiciens « mâles » discutent de la manière dont les femmes doivent attacher leur foulard sans même leur demander leur avis... N'est-ce pas très révélateur ?

Dans les universités, il y a environ 2 400 000 étudiants, dont environ 1 040 000 étudiantes ; parmi celles-ci, on estime qu'environ 3 000 mettent le foulard. Mais maintenant la pression religieuse va augmenter énormément leur nombre. Et ceci n'est pas bon signe pour les droits des femmes.

Si le gouvernement était vraiment sincère, et s'il était vraiment pour les libertés, il commencerait par accorder le droit de grève, le droit d'avoir des conventions collectives à ses fonctionnaires ; il résoudrait la question kurde qui occasionne tant de souffrances ; il répartirait le revenu équitablement, et pas seulement en paroles. Qu'il reconnaisse les droits syndicaux pour tout le monde ; qu'il fasse le nécessaire contre la pression, la violence, les viols et les assassinats commis au nom des coutumes ; qu'il améliore les conditions des travailleuses ; qu'il crée des crèches...

Bien sûr, le gouvernement ne lève même pas le petit doigt pour résoudre tous ces problèmes subis par les enfants et les femmes. Le gouvernement AKP, qui est au pouvoir depuis six ans, non seulement n'apporte pas de solution à ces problèmes, mais les aggrave encore plus.

Avec cette nouvelle loi sur le foulard, ce sont encore les enfants des milieux populaires qui vont souffrir. La pression va s'accroître dans les campagnes, dans les universités de l'Est, et sur tous les étudiants, les droits seront plus limités encore. Les étudiantes, qui pouvaient s'appuyer sur cette loi pour ne pas subir le foulard, n'auront plus cette possibilité. Et la réaction franchira une nouvelle étape.
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Message par com_71 » 05 Juin 2008, 16:18

Avant l'adoption du texte, un article de "lutte ouvrière"

(lutte ouvrière n° 2062 a écrit :Turquie - Le port du foulard autorisé dans les universités ?

En Turquie, le gouvernement Erdogan a déposé le 29 janvier un projet de « réforme de la Constitution » dont le résultat serait d'autoriser dans les universités le port du foulard islamique, jusqu'à présent interdit.

Pour faire adopter une telle réforme, le gouvernement de l'AKP (Parti de la Justice et du Développement) reconduit par les élections de cet été, a besoin de disposer de deux tiers des sièges au Parlement. Il a pour cela le renfort du parti d'extrême droite MHP (Parti de l'Action Nationaliste).

La mesure vise évidemment à contenter la fraction de l'électorat de l'AKP la plus conservatrice et traditionaliste, même si le ministre des Affaires étrangères, Ali Babacan, l'a présentée comme une réforme nécessaire sur le chemin de l'adhésion à l'Union européenne. Le gouvernement a même déclaré que « l'interdiction du port du voile porte atteinte à la liberté de conscience et au droit à l'éducation des jeunes femmes refoulées des universités en raison de leur tenue ».

Déjà, lors des élections législatives de 2002, le parti du Premier ministre avait fait de la fin de l'interdiction du port du voile dans les universités l'une de ses promesses phares pour gagner des voix. En fait, pendant tout son premier mandat il s'était contenté de quelques déclarations, mais aujourd'hui cette mesure pourrait bien être un dérivatif commode.

En effet, après plusieurs années de relative embellie économique, la Turquie semble commencer à s'enfoncer dans la crise. Les rentrées de devises ont commencé à baisser de façon critique et mettent en cause l'équilibre financier. La population vient de subir une rafale d'augmentations des prix, et on parle d'une crise politique grave en 2009 !

Techniquement, le vote de ce projet sur le foulard semble une formalité. Il suffit pour cela de 367 voix, alors que le total des voix de l'AKP et du MHP est de 410. Les généraux turcs, qui s'affirment à toute occasion « les garants de l'État laïc  » pour combattre le gouvernement Erdogan, se contentent cette fois du minimum. Le chef d'état-major Büyükanit s'est borné à dire le 30 janvier que « la société turque tout entière sait ce que pense l'armée ». La manifestation de protestation organisée le 2 février par les milieux kémalistes n'empêchera visiblement pas la loi de passer.

Bien sûr, celle-ci a surtout un caractère symbolique. Elle ne heurte sans doute pas une grande partie de l'opinion turque. Beaucoup ne mesurent pas l'importance de cette interdiction et pensent tout au plus que, à l'université ou ailleurs, les femmes peuvent bien s'habiller comme elles veulent. Mais en fait ce sera une porte de plus ouverte pour tous les tenants de la tradition et de l'oppression des femmes qui l'accompagne, oppression dont le port du voile n'est qu'un des signes extérieurs.

Dans les années qui viennent, les femmes turques risquent donc de faire les frais, dans leur vie quotidienne, de ce geste démagogique du gouvernement Erdogan. Quant à être un dérivatif au mécontentement qui risque d'atteindre celui-ci, il pourrait être de bien courte durée.

Julien SILVA
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Message par jeug » 05 Juin 2008, 16:53

(lutte ouvrière n° 2062 a écrit :Turquie - Le port du foulard autorisé dans les universités ?

(...)

La mesure vise évidemment à contenter la fraction de l'électorat de l'AKP la plus conservatrice et traditionaliste, même si le ministre des Affaires étrangères, Ali Babacan, l'a présentée comme une réforme nécessaire sur le chemin de l'adhésion à l'Union européenne. Le gouvernement a même déclaré que « l'interdiction du port du voile porte atteinte à la liberté de conscience et au droit à l'éducation des jeunes femmes refoulées des universités en raison de leur tenue ».

(...)

Julien SILVA

Qu'y a-t-il de vrai derrière cet argument ? D'où sort-il ?
jeug
 
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Message par yannalan » 05 Juin 2008, 17:04

Je rappelle juste qu'en Europe, France y compris, les étudiantes, majeures et vaccinées en général, s'habillent comme elles veulent à l'université...
yannalan
 
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Message par Proculte » 05 Juin 2008, 19:00

Oui mais en europe y pas danger de laicité.Bientot plus AKP :-P
Proculte
 
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Message par satanas » 05 Juin 2008, 20:06

(yannalan @ jeudi 5 juin 2008 à 18:04 a écrit : Je rappelle juste qu'en Europe, France y compris, les étudiantes, majeures et vaccinées en général, s'habillent comme elles veulent à l'université...
Ca ,c'est continuer de faire croire,ou feindre de croire qu'il s'agit d'une simple question de gôut et choix vestimentaires, alors qu'il est évident que dans certains pays ou milieux ,la pression religieuse reste extrêmement forte et que cette question du voile reste une représentation de l'assujettissement des femmes à la loi des mâles .

Et que toute concession sur ce terrain ,même sur des symboles ,est un recul pour le droit et les libertés des femmes.
satanas
 
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Message par Indesit » 06 Juin 2008, 12:42

(com_71 @ jeudi 5 juin 2008 à 15:59 a écrit :
(afp 05 06 2008 a écrit :Foulard islamique en Turquie: annulation d'un amendement jugé contraire à la laïcité
AFP Par Burak AKINCI

ANKARA (AFP) - La Cour constitutionnelle a annoncé avoir annulé jeudi un amendement du parti islamo-conservateur au pouvoir en Turquie autorisant le port du foulard islamique dans les universités du pays, jugeant qu'il est contraire à la laïcité.


La Cour s'était réunie pour statuer sur l'autorisation du port du voile à l'université, une décision qui pourrait s'avérer cruciale pour le parti islamo-conservateur au pouvoir menacé d'interdiction pour actions contraires à la laïcité.

Les onze juges devaient examiner une requête de l'opposition laïque demandant l'annulation d'une révision de la Constitution adoptée en février à l'Assemblée nationale, autorisant le port du foulard dans les établissements universitaires.

Les délibérations ont débuté à 06h30 GMT mais les juges devaient au préalable se pencher sur cinq autres dossiers qui figuraient à leur agenda avant de passer à la question très controversée du foulard sur les campus, selon les télévisions.

Cette révision contestée de la constitution constitue l'un des principaux arguments d'une procédure séparée en attente devant les mêmes juges, celle demandant l'interdiction du parti de la justice et du développement (AKP, issu de la mouvance islamiste) pour "actions allant à l'encontre de la laïcité" en Turquie, pays musulman mais au régime laïc.

Plusieurs scénarios étaient envisagés: les magistrats pouvaient notamment décider de rejeter le recours de l'opposition en estimant que la légalisation du port du voile ne constitue pas une entorse à la loi fondamentale, ou juger éventuellement que la réforme en l'état n'est pas suffisante pour permettre aux étudiantes voilées d'entrer sur les campus universitaires.

La Cour pouvait aussi juger que la révision porte atteinte aux dispositions non amendables de la loi fondamentale, en l'occurence la laïcité, et décider de l'annuler. Une majorité de sept juges était nécessaire dans un tel cas de figure.

Ce scénario était considéré le plus mauvais pour l'AKP car il pourrait préfigurer une dissolution de cette formation au pouvoir depuis 2002 qui a polarisé la société turque en autorisant le port du voile dans les facultés.

L'AKP s'est défendu en faisant valoir que l'interdiction du voile, imposée après le putsch militaire de 1980, contrevient à la liberté de conscience et au droit à l'éducation.

La Cour s'était déjà prononcée à deux reprises dans le passé contre le port du voile dans les universités.

L'interdiction de se couvrir la tête sur le campus avait aussi été maintenue par le Conseil d'Etat turc et la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH).

Malgré la révision, la plupart des universités ont maintenu l'interdiction, jugeant que le parlement devait adopter une réglementation détaillant le code vestimentaire autorisé et excluant les symboles les plus ostentatoires d'un islam radical, comme le tchador ou la burqa.

La question du voile divise depuis plus de deux décennies la Turquie où il est interdit de le porter à l'école et dans la fonction publique.

Le voile le plus présent en Turquie est le fichu traditionnel noué sous le menton et porté surtout dans les campagnes. Aux yeux de la population, ce voile incarne la Turquie profonde et traditionnelle. Porté par habitude plus que par ostentation, il exprime moins un acte politique qu'un attachement aux coutumes.

Le voile musulman, le hidjab, a une signification et une implication bien différentes, montrant une appartenance à la foi musulmane. Ce voile couvre soigneusement tous les cheveux et encadre l'ensemble de la tête.

Les partisans de la laïcité (l'armée, la magistrature et l'administration des universités) estiment que le port du voile est un défi au régime laïc en vigueur en Turquie.


Bonjour,

pour info, des spécialistes en langues-o pourront préciser mais a priori "hidjab" est le mot arabe, "tchador" le mot perse ou iranien.

Les turcs disent "türban".

à +
Indesit
 
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